mardi 13 août 2013

AFFAIRE KULIK : L'accusation tient à un fil de voix

M e Stéphane Daquo défend Willy Bardon, le deuxième homme soupçonné du viol et de l'assassinat d'Élodie Kulik. Il considère comme insuffisantes les charges pesant sur son client.

Si tout être humain digne de ce nom veut savoir qui est à l'origine de la mort affreuse d'Élodie Kulik, en janvier 2002, le même principe d'humanité oblige à entendre la voix de la défense, cette empêcheuse de condamner en rond. Dans le cas de Willy Bardon, M e Stéphane Daquo, du barreau d'Amiens, dorénavant accompagné de M e Grégoire Lafarge, du barreau de Paris, a longtemps joué profil bas. Le respect du secret d'instruction en est la première raison. Et puis, disons-le, l'arrestation du deuxième homme, après que le premier - aujourd'hui mort - eut été confondu, soulageait tout le monde.

Les actes de procédure obligent cet été les défenseurs à sortir du bois. En juillet, Willy Bardon a formulé une demande de remise en liberté, rejetée par la chambre de l'instruction. « On recommencera », affirme Stéphane Daquo.

Le 17 septembre, il s'apprête à plaider trois requêtes en nullité : l'une relative à l'expertise psychiatrique, l'autre à la qualification exacte des faits reprochés à son client (séquestration, viol, assassinat), et la dernière à l'expertise de la voix.

« Dans ce dossier, il n'y a ni aveu, ni empreinte digitale, ni trace ADN. Aucune preuve que Willy Bardon se trouvait à Tertry (le lieu de l'assassinat ndlr) ce soir-là », scande l'avocat amiénois.
 

Juste une voix...
 

Quand Élodie a été enlevée, avant d'être sexuellement agressée, elle a réussi à appeler les pompiers. Ils ont gardé l'enregistrement de cette communication tragique. On y entend des cris, les mots angoissés de la jeune femme et des voix. Des hommes et une femme ? Deux, trois personnes en plus d'Élodie et de l'opératrice des pompiers ? En la matière, il n'y a pas de certitude. « La prudence s'impose. Il faut en effet savoir qu'à l'époque les pompiers enregistraient les conversations sur des cassettes qui, sauf incident notable, étaient réenregistrées les jours suivants. On a longtemps pensé discerner une voix de femme et maintenant on nous dit qu'il pourrait s'agir d'une superposition, souligne M e Daquo. Il y a un vrai débat sur cette troisième voix. »

Débat crucial : le cas échéant, au moins un criminel se trouve encore dans la nature.

Quand, en janvier 2012, Grégory Wiart, un habitant de l'Aisne mort en janvier 2003 à l'âge de 24 ans, a été identifié comme le porteur de l'ADN retrouvé sur la scène de crime, les gendarmes se sont naturellement intéressés à son cercle d'amis, et notamment ceux au sein d'un club d'amateurs de 4x4.

C'est ainsi qu'ils sont tombés sur Bardon. « Il avait passé plusieurs coups de fil après l'identification de son copain Wiart, ça peut être naturel, non ? pointe Stéphane Daquo. Puis il a juste dit que la voix de l'enregistrement pourrait ressembler à la sienne. Ce n'est pas un aveu. »

Une proche aurait aussi reconnu cette voix. Mais là, c'est la faiblesse humaine du témoignage qui est pointée du doigt par la défense. « Une femme a bien reconnu, formellement, Willy Bardon comme l'homme qui l'avait agressée dans la Somme un week-end où nous avons la preuve qu'il se trouvait à Val-d'Isère, en Savoie. »

Une sacrée bataille, de procédure d'abord, de prétoire peut-être ensuite, s'annonce donc.

En attendant, Wiart est un détenu modèle, placé à l'isolement pour le protéger de la vindicte des autres prisonniers.


http://www.courrier-picard.fr/region/l-accusation-tient-a-un-fil-de-voix-ia0b0n157583

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