À la barre, le premier gendarme confirme qu’il a constaté que « ses cheveux étaient mouillés. Pas humides mais très mouillés, comme s’il sortait de la douche. C’est le seul souvenir qu’il me reste ».
« Avez-vous entendu Muller dire qu’il avait eu du sang sur lui ? », questionne la présidente Thouzeau. « Je ne me souviens plus… », répond le militaire. La magistrate le regarde comme une bête de foire, lui fait remarquer que cette information fondamentale ne figurait pas sur le PV de constatations. « Ce PV, je l’ai simplement signé, je ne l’ai pas rédigé. C’était mon premier poste en brigade départementale, j’étais en observation… ».
« L’affaire a été très médiatisée », poursuit la présidente. « Durant 14 ans, vous ne vous êtes pas manifesté, vous ne vous êtes pas rendu compte que cette information était capitale ? ». Long silence gêné…
« J’avais un adjoint alcoolique… »
Le second gendarme fait preuve de davantage d’assurance. « En attendant le major avec mon collègue, j’ai constaté qu’une partie du tee-shirt de Jean-Louis Muller ainsi que ses cheveux étaient humides. J’ai tout de suite eu cette impression : ‘’ Tiens, il s’est douché ! ‘’. Ça m’a étonné, c’est un souvenir qui ne m’a plus jamais lâché… Je ne l’ai pas entendu parler de sang. Quand les autres gendarmes sont arrivés, je leur ai dit qu’il y avait deux ou trois choses bizarres. Le major m’a aussitôt répondu : ‘’ Hop, hop ! Il y a la brigade de recherches qui est là, on est dessaisi ! ‘’. Mais ils savent tous ce qu’on a vu ce soir-là et ce qu’on a dit… ».Le major, désormais à la retraite, ne se souvient plus… « C’était une découverte de cadavre. Nous, c’est simple : c’était le gel des lieux, aviser la compagnie et le parquet. Et puis, j’avais beaucoup de travail et un adjoint alcoolique… ». « Chutologue » il y a quelques jours, 357 Magnum en main près de la table en L, Me Dupond-Moretti s’est mué hier en « douchologue ». Il se campe en face d’un des gendarmes : « Bon, admettons que Muller a pris une douche pour effacer les traces de sang. Il l’a forcément prise avant 21 h 24, avant d’avoir prévenu les secours. Donc, il prend une douche avant 21 h 24 et, quand vous arrivez, à 21 h 55, il a encore les cheveux mouillés ? Et les autres gendarmes, quand ils arrivent, à 22 h, eux, ils ne remarquent rien ? Là, il est tout sec.? ».
« Vous avez triché ! »
Promis aux auspices les plus sombres, le commandant de police qui a mis la main sur les deux gendarmes amnésiques dans des conditions assez obscures défend son enquête bec et ongles. À la barre, harcelé par Dupond-Moretti, il plie, comme un roseau frêle, mais ne rompt pas. Il s’offusque même : « Vous êtes dans une continuelle attitude d’intimidation ! ». Pour le policier, « le maquillage de la scène de crime est à la hauteur des qualifications professionnelles » (NDLR : de légiste) du médecin.L’avocat, lui, accuse le flic d’avoir « copieusement triché ». « Lors de la garde à vue, vous avez assuré, à deux reprises, que le tir avait été effectué de gauche à droite. C’est faux ! Les expertises, dont on disposait, faisaient état du contraire ».
« On attendait les résultats d’une expertise et le juge les a eus dans un premier temps par oral », souligne le policier. « L’expert lui a indiqué qu’il était possible que le tir soit effectué ainsi (NDLR : le juge d’instruction viendra confirmer plus tard à la barre). J’ai donc posé la question au docteur Muller ». Déposé quelques semaines plus tard, le rapport définitif assurera que le tir était de droite à gauche…
http://www.estrepublicain.fr/actualite/2013/10/30/la-il-est-tout-sec
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