lundi 21 octobre 2013

Nancy : le Dr Muller clame son innocence

Déjà condamné à deux reprises pour le meurtre de sa femme, Jean-Louis Muller, un ancien médecin légiste, a une nouvelle fois clamé son innocence à l’ouverture de son troisième procès ce lundi devant la Cour d’assises de Nancy.
«Je suis innocent» a-t-il répondu à la présidente du tribunal qui l'interrogeait sur le fait qu'il a toujours nié.
Interrogé par Me Eric Dupond-Moretti sur l’existence d’un mobile de Jean-Louis Muller pour tuer sa femme, un enquêteur a répondu «Non».
 

Les ténèbres ou l'acquittement

Nancy. L’expression « odyssée judiciaire » est pour l’heure réservée à l’affaire Grégory ou à celle du double meurtre de Montigny-les-Metz, qui connaîtra en avril prochain son quatrième procès. L’affaire Jean-Louis Muller, si elle ne s’étire pas sur plus de vingt-cinq ans, n’est cependant pas loin d’émarger à cette catégorie. Au terme d’un cheminement judiciaire tortueux de quatorze ans, ce médecin légiste alsacien de 57 ans, poursuivi pour le meurtre de son épouse, sera jugé pour la troisième fois et ce, à Nancy, à partir de ce lundi par la cour d’assises en appel de Meurthe-et-Moselle.
C’est sans aucun doute le procès de l’année. L’affaire ? Binaire. Tranchante comme un couperet. Muller coupable ou pas. Vingt ans ou rien. Les ténèbres ou l’acquittement. Jean-Louis Muller, qui assure qu’il s‘agit d’un suicide car son épouse était dépressive, a déjà été condamné à deux reprises à vingt ans, à Strasbourg en 2008 puis à Colmar en 2010, avant que la Cour de cassation, pour des problèmes de forme et non de fond, ne casse le verdict.
Le 8 novembre 1999, à 21 h 24, Jean-Louis Muller, notable d’Ingwiller (Bas-Rhin), appelle la gendarmerie, explique qu’ayant entendu un grand bruit au sous-sol et alors qu’il regardait un film à la télé, il est descendu et a découvert, dans la salle de jeux, au pied de la table en L supportant le train électrique des enfants, le corps de son épouse dans une mare de sang.
Sur le sol, un revolver 357 Magnum. Brigitte Muller, 42 ans, a la tête éclatée. Sur le buffet de la salle à manger, face à la photo de mariage, un emballage d’œuf Kinder, avec les mots imprimés ‘’Ciao, ciao, ciao ‘’, est planté avec un petit couteau sur une planchette à saucisson. Un peu plus loin, bien en évidence, un livre grand ouvert : « On ne badine pas avec l’amour », d’Alfred de Musset.

Défendu cette fois par Me Dupond-Moretti

Véritables messages d’adieu ? Mise en scène soigneusement orchestrée ? Toujours est-il que, dans un premier temps, l’affaire est classée comme suicide.
Un mois plus tard, le parquet rouvre le dossier, sur demande insistante de la famille de la victime. La suite ? Un psychiatre assure que l’épouse n’était pas suicidaire, une expertise affirme qu’il y avait davantage de résidus de tirs sur les mains du mari que sur celles de la victime. Troublant…
Deux ans jour pour jour après le décès de son épouse, le docteur Muller est mis en examen pour meurtre. Au terme d’une instruction de six ans marquée par 18 expertises et contre-expertises, le praticien est renvoyé aux assises par la chambre de l’instruction. Contre l’avis du parquet général qui avait requis un non-lieu…
« Depuis, deux cours d’assises ont condamné Jean-Louis Muller », souligne Me Michaël Wacquez, l’un des avocats de la famille de la victime qui aura cette fois en face de lui Me Dupond-Moretti, l’icône des apprentis pénalistes. « Ce troisième procès est une véritable épreuve pour la famille de Brigitte, surtout après le décès de son père, l’an passé », poursuit le conseil. « Elle pensait en avoir terminé après le verdict de la cour d’assises en appel, à Colmar, et n’aurait jamais imaginé que la Cour de cassation puisse annuler le verdict. Deux erreurs de plume obligent à tout recommencer mais nous respectons cette décision. »

« Pas d’empreintes sur le revolver »

Pour Me Wacquez, les éléments à charge sont implacables : « On ne retrouve pas d’empreintes digitales sur le revolver qui a provoqué la mort, on n’en retrouve pas non plus sur le coffret qui contenait cette arme. Il n’y a que très peu de résidus de tir sur les mains de la victime alors qu’il y en a sur les mains de Jean-Louis Muller. Par ailleurs, la position du revolver, retrouvé aux pieds de Brigitte, est difficilement compatible avec le recul provoqué par ce type d’arme. Certains éléments psychologiques également sont importants : Brigitte n’était pas suicidaire au moment des faits, elle revivait, venait de nouer une relation avec une tierce personne qui était devenue son confident. Elle avait prévenu ses parents quelques jours plus tôt qu’elle se sentait menacée par son mari si celui-ci apprenait une relation. Un proche de la famille assure que Brigitte lui a dit : ‘’s’il m’arrive quelque chose, il ne faudra pas le croire… ‘’ »
Jean-Louis Muller comparaîtra libre, comme lors de ses deux précédents rendez-vous aux assises. Il a fait 18 mois de détention provisoire. Et il joue sa vie à Nancy.

http://www.estrepublicain.fr/actualite/2013/10/21/les-tenebres-ou-l-acquittement

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