Ambiance électrique mercredi matin sur les marches du palais de justice de Saintes. Le clan Youness Mellouk et le clan Henri Soko échangent des amabilités et se montrent les muscles avant que ne reprenne le procès du premier pour le meurtre du second.
Quelques heures plus tard, c’est sous haute surveillance policière que tombe le verdict. Des policiers rochelais sont venus prêter la main à leurs collègues saintais. Peut-être les dix ans de réclusion infligés par la cour à Youness Mellouk, non pour meurtre mais pour coups mortels, n’ont-ils scandalisé personne. Les deux clans se sont séparés sans incident, au moins provisoirement, entre deux rangées de képis.
« Neutraliser » Soko
Ne pas se tromper de procès. La victime, c’est bien Soko, et l’accusé Mellouk. Les trois avocats des parties civiles (la femme d’Henri Soko, ses enfants, ses parents, ses frères et sœurs) rappellent ces évidences utiles pour mieux contrer la stratégie de la défense. Depuis le début des débats, l’avocat de Youness Mellouk, Me Denis Giraud (Paris) cuisine chaque témoin à sa façon. À feu vif dès qu’il s’agit d’insister sur le rôle de Soko dans la bagarre, son alcoolémie, sa dangerosité. à l’étouffée quand il veut faire dire et répéter aux amis de Mellouk que non, ce soir-là, dans l’état de panique générale, il n’y avait pas d’autre solution pour « neutraliser » Soko que de lui foncer dessus en voiture.
Le dossier criminel avait été ouvert pour assassinat. Le juge d’instruction l’a requalifié en meurtre, excluant la préméditation. Me Giraud, lui, voudrait le faire descendre d’encore un étage. À l’entendre, faute d’intention d'homicide, les faits relèvent de violences volontaires ayant entraîné la mort sans intention de la donner.
« Oui, Mellouk est coupable d’avoir tué Soko, mais il ne l’a jamais voulu. » Le drame s’est noué au terme d’un enchaînement de circonstances auquel la victime a elle-même contribué, jusqu’à atteindre le point de non-retour. « Personne ne réfléchissait plus, c’était devenu complètement irrationnel. » Quant à l’accusé, 19 ans à l’époque, c’est un « gamin » qui était alors en « pleine dérive »…
« En toute lucidité »
L’avocat général, Christelle Bellet, avait anticipé la plaidoirie de la défense. Youness Mellouk en brave garçon qui n’a pas eu de chance, elle n’y croit pas. S’il a pris quatre ans de prison à Angoulême, c’est qu’il a été considéré comme le meneur d’une triste bande à qui l’on doit une demi-douzaine de cambriolages et de vols de grosses berlines allemandes. Plus le saucissonnage d’un couple contraint sous la menace de donner carte bancaire et code secret.
Elle ne croit pas non plus au « je l’ai pas fait exprès » du « gamin ». « Il a délibérément foncé sur sa victime, de façon réfléchie, en toute lucidité. » Et puis Henri Soko ne présentait aucun danger. « Il était loin d’Aboubakar et ne risquait pas de le rattraper à cause d’une crise de goutte qui le faisait boitiller. »
L’accusation a argumenté trois quarts d’heure avant de requérir « une juste peine » qu’elle a fixée à douze ans de réclusion criminelle. La défense a plaidé une heure et demie avant de demander à la cour de trouver « le point d’équilibre ». La cour d’assises les a entendues toutes les deux : si elle a écarté le meurtre, la peine qu’elle a prononcée est lourde pour de « simples » coups mortels. « Une cote mal taillée », commentait Me Giraud à l’issue de l’audience. Ou bien taillée, c’est selon.
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