jeudi 27 mars 2014

Procès Guillot : l’accusé s’enferme dans le déni

REIMS (51). Malgré les évidences nées de l’enquête, Marcel Guillot a choisi d’adopter face aux jurés une attitude déconcertante. Rien, pourtant, n’a pu semer le doute quant à sa culpabilité.
Il entre. Vieillard fantomatique. Crâne dégarni, regard vide. Dans la salle, tout se tait. Seul le parquet craquelle sous les pas hésitants de l’accusé, soutenu par l’homme qui l’escorte. Vacillant, il s’assoit. Sourd, l’accusé est appareillé en conséquence et « il y a des piles de rechange », rassure le président Bresciani. Face à lui : Marcel Guillot, 93 ans, plus vieux détenu de France, accusé d’homicide volontaire sur personne vulnérable.
« – Bonjour Monsieur, lui sourit le président.
– …
– Bonjour, Monsieur !
– J’entends rien du tout ! »
Tirage au sort des jurés. Guillot, assis, baisse la tête. Prostré. Pour parer au problème de surdité de l’accusé, le président Bresciani l’invite à se rapprocher. Seul le pupitre sépare les deux hommes. Penché en avant, le vieil homme tend l’oreille, les poings appuyés sur ce dossier dans lequel tout l’accuse. Il a choisi de nier les évidences nées des investigations : « Non », il n’a pas donné la mort à Nicole Eldib ; « Non », il ne l’a pas frappée. Développée depuis la reconstitution du 16 octobre 2012, cette stratégie de défense se révèle en parfait décalage avec les conclusions de l’autopsie pratiquée, le 8 décembre 2011, par le docteur Paul Fornes.
Dans l’après-midi, ce médecin est venu détailler à la barre les sévices endurés par Nicole Eldib, surprise dans son sommeil la nuit de sa mort. « Le nombre de coups portés sur la victime est difficile à estimer au regard de la confluence des hématomes. Au moins une vingtaine, je pense. » Fractures du nez, de la mâchoire et strangulation finale. Parmi les jurés entraînés en terra incognita, au cœur même du crime, des regards avaient changé.

« Elle est tombée sur l’armoire »

Le président Bresciani demanda : « Tout ce que vous avez évoqué, est-ce compatible avec une chute dans les escaliers ? » Sourire entendu du praticien : « Non, bien sûr. » Soudain, l’accusé lève la main : « Je peux parler ? » De nouveau, le voilà à moins d’un mètre du président. Cette fois, le ton se fait virulent : « Je vais dire la vérité. Eux, ils n’y connaissent rien du tout ! » Sur le banc des parties civiles, les gorges se nouent. « Quand elle m’a vue, elle s’est levée d’un coup, elle s’est emmêlée les pieds dans le tapis et elle est tombée sur l’armoire. Elle avait le visage plein de sang. »
Le précipice de l’aveu s’éloigne. « Moi, j’ai la conscience tranquille, je ne l’ai pas tapée ! », conclut-il. Rappelé à la barre, le docteur Fornes reprend d’un ton aussi neutre que possible : « Ces déclarations sont totalement incompatibles avec mes conclusions. J’ai expliqué les mécanismes des blessures, leurs forces, leurs causes, les projections de sang, etc. Et ce n’est tout simplement pas compatible avec ce que vient de dire Monsieur. »
Revenu sur son banc, Marcel Guillot jette un regard plein de fureur à l’expert. Verdict vendredi.

http://www.lunion.presse.fr/accueil/proces-guillot-l-accuse-s-enferme-dans-le-deni-ia0b0n322654

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