Lorsque la police et les secours arriveront sur place, il sera trop tard. Le bloc-moteur a jailli du châssis, la voiture éjectée à plus de 30 m a plié un panneau de signalisation et Abdallah Gulmez est mourant.
Un autre accident
« Le réflexe du conducteur fautif, quel va-t-il être à cet instant ? », demande Me André Chamy pour la partie civile. « Il porte secours à sa petite amie dont le nez est fracturé et qui a perdu connaissance ? Il court vers l’automobiliste qu’il a percuté ? Non. Il se lamente sur la voiture que sa mère lui a prêtée et s’affole parce que c’est la deuxième qu’il casse. C’est insoutenable. »A l’audience, le tribunal correctionnel s’est ainsi intéressé à l’accident de celui-ci en Allemagne. En effet, six mois avant les faits, après une soirée en boîte de nuit, il prend le volant, file à grande vitesse et ne peut éviter de faire des tonneaux. Deux passagères auront l’une la clavicule, l’autre la mâchoire cassées.
« Et ça ne vous a pas mis de plomb dans la cervelle ? », lui demande le président. « Je ne cherche pas d’excuses », lui répond-il. Le tribunal n’en doute nullement. Le 30 avril, il était convoqué avec son père par le tribunal allemand pour ces faits. La veille de son accident à Belfort. Du plomb dans la cervelle…
D’autant que le prévenu, au cours de cette audience, oscille entre reconnaissance de certains faits et refus de sa responsabilité pour d’autres. Il raconte sa soirée du 1er mai avec des amis et sa copine. Si les autres ont bu, lui pas vraiment. Même si la prise de sang avait révélé à 5 h du matin 1,27 g/alcool dans le sang.
Aurait-il pris des stupéfiants, alors ? « Je n’ai pas fumé ce soir-là, la vieille, oui », proteste-t-il vigoureusement. Impossible de vérifier, les traces de cannabis persistent longtemps dans l’organisme.
La trop grande vitesse et l’engagement dans une voie à contresens ? « J’étais contrarié de devoir ramener un copain au lieu de rentrer à pied tranquillement chez moi », explique-t-il posément, sans grand état d’âme. « Alors, après l’autoroute, ma conduite a été irresponsable. Je roulais de 80 à 90 km/h ». Et les feux grillés ? « Je reconnais avoir grillé les deux premiers, mais le dernier, je suis sûr qu’il était vert. »
Dix ans de suspension de permis requis
Ce n’est que lorsque le père d’Abdallah, invité à s’exprimer à la barre, a crié sa douleur, que le garçon s’effondre. « Nous vivons en paix aux Résidences depuis 40 ans », a-t-il commencé la posture fière, mais des sanglots étouffés dans la voix. « Les amis ont entendu l’horrible choc avant de voir ce qui s’était passé. Nous sommes descendus. Aujourd’hui, c’est son anniversaire. Mais, il n’est plus là. Sa chambre est intacte. Personne n’y est encore entré. » Dans la salle d’audience pleine à craquer, d’autres sanglots étouffés lui font écho. Mais tous restent dignes dans la souffrance.En retour, le prévenu a semblé s’effondrer. « J’aurais dû mourir à sa place », a-t-il sangloté.
Le parquet a requis cinq ans de prison dont un an avec sursis et l’annulation du permis de conduire pendant dix ans.
L’affaire a été mise en délibéré au 26 novembre prochain.
http://www.estrepublicain.fr/actualite/2014/11/06/le-cri-de-douleur-d-un-pere
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