dimanche 12 avril 2015

Un chef d'entreprise nicolaïte à la barre pour défaut de sécurité

Dix jours tout juste après la lourde condamnation d'un artisan couvreur de Saint-Nicolas-de-la-Grave pour manquement de sécurité sur un chantier ayant entraîné la chute de l'un de ses salariés aujourd'hui paraplégique, un chef d'entreprise d'une société spécialisée dans la fabrication d'armature pour béton installée sur la même commune, vient de comparaître devant le tribunal d'instances de Castelsarrasin, pour des faits quasi similaires.
En effet, le 22 avril 2013, un salarié intérimaire de cette société nicolaïte, fait une lourde chute en changeant une bobine de soudure. Installé sur une planche posée sur son établi pour réaliser cette opération, Adeslem A., 39 ans, obtenait pas moins de 45 jours d'ITT (incapacité totale de travail) et héritait de lourdes séquelles notamment une perte irrémédiable de l'audition à une oreille.

«On ne peut pas tout faire immédiatement»

Chemise blanche ouverte, une barbe de trois jours, Cédric S., 40 ans, le patron de cette société de 37 salariés basée depuis 2010 à Saint-Nicolas-de-la-Grave, n'avait visiblement pas l'intention de reconnaître ses torts face à la présidente du tribunal de police, Vanessa Maury. «C'est un incident regrettable, mais je ne peux pas être derrière chaque salarié pour leur faire respecter les consignes de sécurité» arguait le chef d'entreprise qui donnait une tout autre explication de l'incident que celle de son ancien soudeur. «Je ne comprends pas pourquoi, il a fabriqué cette installation pour atteindre la bobine, il avait un escabeau fait pour ça à dix mètres de lui…» La moue dubitative, la présidente V. Maury ne manquait pas de lire le procès-verbal du contrôleur du travail établissant de nombreux manquements au Code du travail en matière de sécurité. «L'inspection du travail a d'ailleurs formulé à plusieurs reprises des avertissements en ce sens» insistait la magistrate qui rappelait également qu'elle ne voyait pas pourquoi la victime aurait sciemment réalisé «cet échafaudage de fortune s'il avait eu le matériel adéquat pour réaliser cette opération de maintenance.»
Des points que l'avocate du plaignant, Me Alexandrine Perez-Salinas allait reprendre avec clarté et efficacité. «Dans cette affaire, il y a eu des manquements graves de sécurité et un vrai défaut d'information en la matière... aujourd'hui la défense nous parle d'un escabeau. Pourquoi Adeslem A. aurait-il pris le risque de changer à plusieurs reprises une bobine à 3,5 mètres au-dessus de son poste de travail?» La victime ayant déclaré lors de son audition à la gendarmerie que ce précaire échafaudage était une manœuvre courante dans l'entreprise et la seule que l'on lui avait proposée pour changer ses bobines de soudure.

Le vice-procureur donne de la voix

Visiblement irrité par les réponses du chef d'entreprise, le vice-procureur Pierre Vignolles qui officiait pour le ministère public, ne mâchait pas ses mots devant l'attitude désinvolte du mis en cause. «Tout ne peut pas se faire immédiatement dans une entreprise nous dit Cédric S., on peut l'entendre dans un certain nombre de domaines, pas dans celui de la sécurité !» tonnait avec célérité le magistrat montalbanais. Que je sache Adeslem A. n'a pas de tendance suicidaire alors comment expliquer l'usage de cette planche alors que dans le même temps plusieurs rapports de l'inspection du travail nous confirment des irrégularités en matière de sécurité dans cette entreprise...» concluait Pierre Vignolles qui réclamait une amende conséquente (3 750 euros étant le maximum requis) «mais avec sursis compte-tenu du casier judiciaire vierge» du prévenu.
Avant que la présidente Maury ne donne la date du délibéré, Me Arnaud Clarac, le conseil de l'entreprise, allait pendant près d'une demi-heure battre en brèche, point par point le procès-verbal du contrôleur du travail en qualifiant celui-ci de «partial» et réclamant la relaxe de son client sur la prévention. Décision le 6 mai. Celle-ci n'entérinera toutefois pas les poursuites contre le chef d'entreprise qui retrouvera son ex-soudeur devant le tribunal des affaires de sécurité sociale (TASS) où Me Alexandrine Perez-Salinas sera en mesure de réclamer de lourdes indemnités au vu des séquelles de son client.

http://www.ladepeche.fr/article/2015/04/12/2085544-chef-entreprise-nicolaite-barre-defaut-securite.html

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