lundi 22 juin 2015

Nancy : Il y a 30 ans, l’affaire Weber

C’est un dossier qui aura tenu la France en haleine durant plus de cinq ans, un incroyable face-à-face entre le juge Gilbert Thiel, travailleur forcené, et celle qui fut surnommée « la Diabolique », qui a toujours clamé et clame encore aujourd’hui son innocence depuis Cannes.
Bernard Hettier a disparu le 22 juin à Nancy 1985 et beaucoup de choses accusent alors Simone Weber. Le lendemain soir, des voisins ont entendu un bruit lourd, « comme un corps qui tombe », puis un autre bruit, de moteur cette fois, « comme un aspirateur mais qui ne bouge pas », et l’ont vu dans la foulée descendre de lourds sacs poubelle. Dans sa voiture, on découvre une disqueuse, louée la veille de la disparition de Bernard Hettier. Et la R9 de l’ancien amant est retrouvée dans un box loué par Madeleine, la sœur de Simone, à Cannes…
Lors de l’enquête, le juge Thiel découvre également qu’elle est mariée à un certain Marcel Fixard, 80 ans, de Rosières-aux-Salines, que ce dernier, remplacé par un figurant à la mairie, n’en a jamais rien su, que le testament par lequel elle a hérité est un faux. Car Fixard, c’est ballot, est mort d’une crise cardiaque trois semaines après avoir convolé en justes noces avec Simone. Thiel aussi découvre que cette faussaire de génie s’est fait prescrire de la digitaline, un cardiotonique, avec une fausse ordonnance et fait exhumer le corps du défunt. Mais il n’y a aucune trace du médicament…
Le corps d’Hettier, lui, est toujours introuvable. Le juge chemine cependant sous une bonne étoile : une valise est découverte dans la Marne, à Poincy (77). Elle contient un tronc humain dont les membres ont été sciés. Des experts médicaux se penchent sur des radiographies du disparu, assurent qu’il existe des similitudes. Par ailleurs, la composition de la peinture bleue découverte sur les parpaings qui lestaient la valise est la même que celle du toit de la maison de Rosières…
« Un regard foudroyant »
Le procès ? Gigantesque. Le premier procès-spectacle de l’histoire. Six semaines, en janvier et février 1991, avec 138 témoins et plus de 70 places pour la presse. Défendue par Mes Behr, Garaud, Robinet et Glock, Simone Weber conteste pied à pied chacune des cotes du dossier. Philippe Ker requiert la perpétuité. Trente ans plus tard, l’avocat général se souvient : « C’est une femme qui n’acceptait pas sa condition, qui a voulu sortir de son ordinaire et elle l’a fait par tous les subterfuges possibles. En se présentant sous ses meilleurs auspices, elle a essayé de capter l’héritage de gens qui n’étaient pas très argentés. A l’audience, elle s’est montrée extrêmement théâtrale. Tous les témoins qui pouvaient correspondre à son rang social, elle les toisait du regard, les méprisait, les invectivait. Ce dont je me rappelle également, c’est son regard. Elle a un regard foudroyant, que vous ne pouvez pas soutenir. Un regard qui se pose sur vous, perçant, dur. Je pense que lors de ce procès, elle était contente d’être sous les feux de la rampe, elle avait l’impression d’exister. C’est une personne médiocre, peu intelligente mais diabolique. Et elle n’a pas assumé le verdict… ». Après onze heures de délibéré, la « Bonne Dame de Nancy » est reconnue coupable du meurtre de Bernard Hettier, mais sans préméditation, et acquittée de l’empoisonnement de Marcel Fixard.
Un verdict qu’elle n’entendra pas. Au moment d’écouter la décision de ses jurés, Simone Weber fait - ou simule ? - un malaise et est évacuée. L’huissier viendra lui signifier l’arrêt à l’hôpital. « Quand je suis arrivé, elle était assise sur son lit », se souvient André Siatte. « Je crois que j’étais plus stressé qu’elle. La décision, elle la connaissait déjà, ses avocats étaient passés avant. Elle m’a juste demandé quelle avait été la réaction de la foule. Elle a pris un petit paquet de bonbons sur sa tablette, à côté du lit. ‘’Vous en voulez un ?’’. Je me suis bien sûr abstenu ».

http://www.estrepublicain.fr/edition-de-nancy-ville/2015/06/22/il-y-a-30-ans-l-affaire-weber

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