jeudi 17 septembre 2015

Agathe a été torturée par des barbares

Quatre jeunes ont été condamnés par le tribunal de Tarbes pour avoir fait vivre un véritable calvaire à une fillette de 6 ans, multipliant violences et jeux humiliants. Des actes de barbarie et de torture ignobles et incompréhensibles.
«ça fait mal, c'est bien fait… Baisse-toi... Fais la poule… Ne bouge pas.» En pleurs et terrifiée, la petite Agathe (1) crie «Marraine, j'ai mal». Ses tortionnaires rient et filment. Insoutenable, la projection à l'audience d'une séquence d'humiliation et de tortures infligée à Agathe, à l'aube de ses 6 ans, lors des vacances de la Toussaint, du 22 au 29 octobre 2013, à Tarbes. Agathe a passé huit jours en enfer, aux mains d'un groupe de cinq jeunes décervelés qui s'est transformé en un gang de barbares. Mené par une mineure de 17 ans et une majeure de 18 ans.
Au départ, les parents d'Agathe la confient en garde pour la semaine à sa marraine Clara, 18 ans. La marraine va devenir la marâtre de la petite. Mais comment les parents peuvent-ils l'imaginer ? Clara s'est déjà occupée à plusieurs reprises d'Agathe et envisage même de travailler dans le milieu de la petite enfance. Tout s'était bien passé jusque-là. Clara gardait Agathe chez ses parents. Mais elle a quitté le domicile parental pour débuter une colocation avec un copain, Julien, à Tarbes. Elle en informe la maman qui lui remet la petite à la gare de Tarbes, en toute confiance.

«Et moi, je ne bouge toujours pas»

Dès le premier jour, la première gifle tombe. Il y en aura d'autres et une succession crescendo et inimaginable de mauvais traitement, d'humiliations : jeux dégradants, coups, de pieds, de fouet, de ceinture, dont certains avec la boucle, fessées, brûlure, etc. L'énumération des violences donne la nausée et dépasse l'entendement. Comment des jeunes - dont certains ont certes des déficiences intellectuelles ou mentales - qui ne sont pas des délinquants, ont pu commettre de tels actes ? C'est l'incompréhension. On n'a pas d'explication. Me Jacques Bertrand, conseil de Julien, dit ne pas trouver «l'initiative des choses» chez son client qui, lors de sa première audition, ponctue la narration des scènes de violences par un : «Et moi, je ne bouge toujours pas». En effet, le calvaire d'Agathe a duré huit jours, et tous, à des degrés divers, y ont participé, mais personne n'a dit «stop», n'a prévenu les parents ou alerté la police. Alors quoi ? Phénomène de groupe où personne n'ose dire non ? Pour Me Stéphane Jaffrain, conseil de Benoît, le plus âgé de la bande - 32 ans à l'époque des faits - mais adulte handicapé, «on se trouve dans le mécanisme du harcèlement», avec deux harceleuses, les deux leaders du groupe, Marjorie et Clara, la harcelée, Agathe, et les témoins, à la fois passifs et actifs. Et ces derniers agissent sur ordre car ils sont sous l'emprise de Marjorie et surtout de Clara.

Clara la machiavélique

En effet, le témoignage de la sœur de Benoît la confirme comme la manipulatrice en chef du groupe. Clara la machiavélique qui a tenté de faire porter le chapeau des châtiments subis par Agathe à son père. à la barre, Clara, au regard fuyant et froid, ne manifeste aucune émotion. La présidente Élisabeth Gadoullet lui demande si elle a conscience de la gravité de ce qu'elle a fait. «Je me dis que la façon dont elle a vécu, c'est pas bien. C'est horrible». Mais cela sonne faux. Dans le déni, elle ne reconnaît n'avoir donné que des gifles qu'elle justifie d'ailleurs : «Les parents m'avaient dit de la corriger si elle n'était pas sage». La présidente Gadoullet poursuit : «Vous reconnaissez votre cruauté ?» Réponse de Clara du bout des lèvres : «Oui». La présidente enchaîne : «Comment l'expliquez-vous ?» Réponse de Clara : «Je sais pas». Là encore, cela sonne faux dans la bouche de la jeune femme, cible des avocates des parties civiles. «C'est à vous que j'en veux, vous avez été l'instigatrice, le moteur de cette histoire… Seriez-vous le démon ?», interroge Me Christiane Charbonnel-Lac, conseil des parents. Auparavant, Stéphanie Balespouey, avocate de la grand-mère d'Agathe, avait regretté que pareils «actes de barbarie et de tortures, qui portent atteinte à la dignité d'une petite fille, n'aient pas été jugés devant la cour d'assises». Me Charbonnel allant même plus loin : «Vous avez des adultes qui ont torturé une fillette de 6 ans pendant 8 jours et aucun n'a fait un seul jour de détention».
François Jardin, substitut du procureur, répond que les parties civiles auraient pu soit soulever l'incompétence du tribunal, soit contester l'acte de renvoi.
Que fallait-il de plus ? Que la petite meure ? Le drame fatal a certes été évité mais le traumatisme de la petite est immense. C'est un voisin qui a signalé aux parents que leur fille était dans la rue, à 4 heures du matin, avec Marjorie. La petite était couverte de bleus et d'ecchymoses. Elle gardera toute sa vie des séquelles morales de ses vacances de la Toussaint 2013. Le tribunal a condamné ses bourreaux aux peines suivantes : Clara : 4 ans dont 12 mois avec sursis, mise à l'épreuve (SME) pendant 2 ans, avec obligation de soins psychologiques et psychiatriques, de travail et d'indemniser les victimes. Elle a été placée sous mandat de dépôt à l'audience. Julien, 2 ans dont 18 mois avec SME. François, 2 ans dont 1 an avec SME. Benoît, 1 an dont 6 mois avec SME. Rappelons que devant le tribunal pour enfants, Marjorie avait été condamnée à 2 ans dont 1 an avec SME.
(1) Les prénoms des protagonistes ont été changés.

http://www.ladepeche.fr/article/2015/09/17/2179092-une-connaissance-de-merah-en-garde-a-vue-a-beziers.html

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