jeudi 22 octobre 2015

Jeudi, début de matinée : dans la tête de Nicolas Bonnemaison

Le procès en appel de Nicolas Bonnemaison touche à sa fin. Avant les réquisitions vendredi et le verdict attendu samedi, cette journée va voir défiler de nombreux médecins et experts, dont Fréderic Chaussoy, médecin poursuivi en 2003 dans l'affaire Vincent Humbert avant d'obtenir un non-lieu et l'ancien ministre Bernard Kouchner.
L'ex-urgentiste du centre hospitalier de la Côte basque est jugé en appel depuis le 12 octobre à Angers pour avoir "empoisonné" sept patients en fin de vie en 2010 et 2011.
Au cours de sa vie de majeur, après une "enfance structurante", Nicolas Bonnemaison a connu différentes phases de dépression : après le suicide de son père en 1987 et plus tard (2008-2009) suite à un burn-out et la rupture d'une relation extra-conjugale. Mais ces épisodes n'ont pas influencé l'ex-médecin bayonnais dans ses actes, selon un expert psychiatrique qui l'a examiné en 2011.
Psychiatre à Paris, Roland Coutanceau n'a "pas retenu l'altération de discernement". Certes, Nicolas Bonnemaison était à l'époque des faits sous anti-dépresseur, mais "le contexte dépressif n'y est pour rien". "Il est lucide et conscient de ses actes", explique l'expert, qui n'a noté "aucun trouble mental", "aucune pathologie problématique de la personnalité". 
D'après Roland Coutanceau, "l'élément clé" qui pourrait avoir amené Nicolas Bonnemaison, "homme sensible face à la détresse" des autres, à agir de la sorte, c'est "l'hyperidentification à autrui". En clair : "je me mets à la place des autres, je prête à l'autre une sensation et une émotion, et en fonction de ce que je lui prête : je détermine mes actes". En l'occurrence ici : la souffrance psychique (que nul ne peut évaluer en l'état actuel de la science) et la perte de dignité que pourraient ressentir le patient dans le coma. 
"Je ne lis aucune intention d'homicide", analyse Roland Coutanceau. "Pour comprendre les actes, il faut comprendre que dans sa subjectivité, il ne tue pas bien sûr, il soulage quelqu'un dont il pense que son état est une atteinte à sa propre dignité".
Expert psychologue, Alain Penin ne retient "aucun trouble de la perception du réel" chez Nicolas Bonnemaison. Mais le spécialiste s'interroge sur une "trajectoire symétrique" entre le père, "admiré sur le plan professionnel et humain", et le fils.
Les deux ont mené une carrière professionnelle dans la médecine (Jean Bonnemaison dirigeait une clinique à Hasparren au Pays basque) et ont connu une relation amoureuse avec une femme qui travaillait dans leurs établissements respectifs. Le père s'est suicidé, en se disséquant l'artère fémorale, après la rupture avec sa compagne. Nicolas Bonnemaison, "lui-même, est allé vers des actes qui allaient le mettre en difficulté dans sa carrière professionnelle". Au point de le mener inconsciemment vers un "suicide professionnel" ?, se demande l'expert.

http://www.sudouest.fr/2015/10/22/proces-bonnemaison-le-contexte-depressif-n-y-est-pour-rien-selon-un-expert-2162279-4018.php

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