samedi 16 avril 2016

Assises du Gard : quatre accusés et un homme carbonisé

U n homme est jugé pour assassinat, trois autres personnes sont accusées d'avoir modifié la scène de crime.
La couleur du banditisme, le goût du banditisme, mais sans banditisme. C'est un peu ce qui se dessine en filigrane de l'affaire d'assassinat commise dans la région d'Uzès, examinée depuis jeudi par les assises du Gard.
Deux balles dans le thorax, une dans la nuque, puis son corps a été carbonisé dans une Audi A3, c'est ainsi qu'a péri Fathi Torche, un soir d'été 2012. Hier, au deuxième jour d'audience, un sentiment diffus a plané sur les assises à propos du véritable mobile de son assassinat. Tué à coups de 357 magnum, il a ensuite été jeté dans le coffre d'une voiture. On apprendra hier que le jeune homme était déjà mort quand le véhicule a été incendié.
Officiellement, le vrai motif de ce meurtre est lié à une créance sur la vente d'une voiture et la thèse souterraine d'une affaire de trafic de drogue a été écartée - et en tout cas pas démontrée - par l'enquête de la section de recherches de Nîmes. Ce vendredi, c'est justement le directeur d'enquête de la SR qui a détaillé les investigations et l'arrivée sur les lieux "de cette scène classique d'un barbecue avec un cadavre avec des balles dans le corps".
Le gendarme explique qu'une précédente altercation s'est produite à Uzès quelques jours avant les faits entre Hervé Goget et Fathi Torche, le second reprochant au premier de ne pas lui avoir rendu l'argent qu'il devait. Il semble que la créance correspond à 1 500 euros. Pour leur part, les légistes (les docteurs Benslima et Dorandeu) comme l'expert en balistique, Alain Artuso, n'ont pas caché les difficultés rencontrées pour examiner un corps carbonisé.

Image contrastée de la victime

Si le climat qui entoure le procès paraît particulier et si la vérité semble faire du yoyo, le président Christophe Vivet ne néglige aucun détail et ne fait pas de cadeau. À cet égard, il a dû délivrer à deux reprises des mandats d'amener pour contraindre des témoins, pas pressés de venir s'exprimer devant la cour d'assises. Comme la veille, sur le banc des parties civiles, Me Yves Carmona, l'avocat de la famille de la victime, n'a pas désarmé et a tenté que l'on ne roule pas dans la boue la mémoire du jeune Fathi Torche, qui reste la victime de ce meurtre. Il avait une grande famille, une compagne et un enfant aujourd'hui âgé de 9 ans.
De leur côté, les avocats de la défense, Mes Dupond-Moretti, Expert et Ferri, ont souligné de nombreuses fois les témoignages qui donnent une image de la victime plus sombre et plus violente. Les proches parleront d'un homme combatif mais pas belliqueux. Sur le parcours de vie de la victime, l'enquêtrice de personnalité évoquera des études en fac d'histoire et une condamnation à de la prison ferme pour des faits de violence alors que la victime était un jeune majeur.
Dans le box des détenus, le principal accusé, Rudolph Grand, confronté à des faits d'assassinat, reste de marbre. La veille, il a reconnu avoir ouvert le feu mais sans vouloir tuer. Il a indiqué avoir agi pour protéger Hervé Goget que Fathi Torche avait brutalisé et emmené de force dans la campagne pour se faire payer une vieille dette. Dans la salle, souvent bondée, avec de nombreux habitants d'Uzès, le public assiste attentif aux débats et aux interventions de la défense, en particulier celles de l'avocat pénaliste lillois ou celle de l'avocat général, Christophe Raffin, qui fourbit ses armes pour son réquisitoire de lundi.
Assassinat ou meurtre ?
"C'est plié", dit un avocat lors d'une suspension. Car pour la défense, surtout celle de Grand, l'enjeu du procès réside dans la sentence qui va intervenir au terme des plaidoiries. Lundi, Mes Expert et Dupond-Moretti vont essayer de convaincre la cour qu'ils défendent effectivement un meurtrier, pas un assassin : trente ans encourus dans le premier cas, perpétuité dans le second. Nul doute que les circonstances du meurtre et les conditions dans lesquelles le corps a été brûlé donnent une coloration singulière à cette affaire. "Pour nous, il s'agit seulement de faire du droit. Grand n'a pas prémédité son geste", glisse un avocat de la défense.

http://www.midilibre.fr/2016/04/15/quatre-accuses-et-un-homme-carbonise,1318210.php

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