samedi 9 avril 2016

Bar-le-Duc : la colère d’une ex-salariée de Bus Est face à deux jugements contradictoires

J’ai manifesté dans la rue contre le projet de loi El Khomri car je refuse que les employeurs puissent licencier les gens sans raison. » Ancienne responsable accueil et qualité de l’agence commerciale des Transports urbains du Barrois (TUB), à Bar-le-Duc, Christine Vincent, 59 ans, estime en avoir fait les frais lorsqu’elle a reçu, le 29 avril 2014, une lettre de licenciement de son employeur, la société Bus Est (groupe Transdev). Au motif d’un refus de modifier ses horaires de travail.
Le litige remonte à la signature d’une nouvelle convention de service public entrée en vigueur le 1er janvier 2014 entre Bus Est et la Communauté d’agglomération Meuse Grand Sud. Entraînant un changement des horaires d’ouverture de l’agence barisienne, notamment le samedi de 9 h 30 à 12 h 30. Impensable pour Christine Vincent, qui tenait à conserver son samedi de repos pour soutenir son mari, qui se bat contre un cancer depuis septembre 2008. « Déjà privé de vie professionnelle, je ne voulais pas le priver en plus de vie sociale et familiale. Des collègues m’avaient même proposé de faire un roulement avec moi le samedi, une intention que j’avais transmise à la DRH, en vain », appuie cette habitante de Brillon-en-Barrois, qui attaque alors son employeur aux prud’hommes.

Premier jugement favorable

Par jugement du 15 décembre 2014, l’instance barisienne donne raison à Christine Vincent, estimant que son licenciement « est dépourvu de cause réelle et sérieuse ». Condamnant la société Bus Est à lui verser douze mois de salaire, soit 20.313,84 €. Elle est en revanche déboutée de sa demande de dommages et intérêts pour harcèlement moral.
Cette victoire est de courte durée, la société Bus Est interjetant appel de la décision. Avec un coup de semonce qui tombe le 5 février 2016. Infirmant le jugement en premier ressort. Cette fois, l’arrêt de la chambre sociale de la cour d’appel de Nancy stipule que « l’aménagement d’horaire adopté par la société Bus Est répond à une nécessité de l’entreprise », que « l’obligation faite à l’intimée de travailler le samedi est compensée par l’octroi d’une journée de repos le lundi », de fait que « l’intimée a commis une faute constitutive d’une cause réelle et sérieuse à son licenciement. »
La cour estime par ailleurs qu’aucun « élément tangible versé aux débats » ne permet d’apprécier une incompatibilité entre la modification de ses horaires de travail et sa vie privée et familiale.

« J’aurais aimé un arbitrage »

« Comment peut-on passer d’un statut de victime à celui de responsable ? », s’insurge Christine Vincent, qui ne digère pas deux conclusions diamétralement opposées. Ses indemnités, qu’elle avait pris soin de mettre de côté, elle a dû les rembourser. « Je me retrouve donc sans emploi avec 2.500 € de prime de licenciement et 3.000 € de frais d’avocat. J’aurais aimé un arbitrage et un troisième jugement mais la cour de cassation, je n’ai pas les moyens de l’assumer. Où est la justice pour tous les Français ? » peste-t-elle.
Si elle n’éprouve aucun regret dans ses décisions, Christine Vincent déplore « la gestion inhumaine » et « la mauvaise foi » de son ex-employeur. « D’autant que mon travail était apprécié, comme a su me le dire le directeur de Bus Est. « En intégrant ce groupe en mars 2008, je pensais avoir la sécurité de l’emploi jusqu’à la retraite ».
La maladie de son mari, contraint à de lourds traitements depuis cinq ans (opérations du pancréas et du foie, protocoles de chimiothérapie), l’a incitée à effectuer des choix. « Je veux passer le plus de temps possible à ses côtés. Nous, on est des Français moyens qui allons sombrer dans la précarité avec nos retraites. Mais ça, personne n’en a rien à faire… »

http://www.estrepublicain.fr/edition-de-bar-le-duc/2016/04/08/bar-le-duc-la-colere-d-une-ex-salariee-de-bus-est-face-a-deux-jugements-contradictoires

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