vendredi 3 juin 2016

Bébé tué : la nounou devant les assises

Une nourrice agréée vient d’être renvoyée devant les assises du Bas-Rhin suite au décès en février 2014 d’un bébé de six mois qu’elle gardait à son domicile de Reitwiller, dans le Kochersberg. La femme de 34 ans aurait projeté le nourrisson qui criait sur le plan dur situé entre les deux lavabos de la salle de bains.
Comme tous les matins, la mère de la petite Nahla prend sa voiture pour déposer sa fille chez la nounou avant d’aller travailler. Ce 3 février 2014, elle a cinq minutes de retard sur l’horaire fixé. Elle arrive à 7 h 35 au domicile de l’assistante maternelle, qui réside à moins de 200 mètres de chez elle à Reitwiller, petite commune du Kochersberg.
Moins d’une demi-heure plus tard, une autre maman sonne à la porte de l’assistante maternelle pour lui amener son enfant. La nourrice lui demande immédiatement d’appeler les secours, expliquant que Nahla vient de tomber alors qu’elle était assise par terre.
Les premiers pompiers sur les lieux constatent que le nourrisson est en arrêt cario-respiratoire. Il présente un hématome de la taille d’un œuf à l’arrière du crâne. Les secours placent la petite Nahla, six mois, en position latérale de sécurité en attendant l’arrivée du Smur.

Des multiples versions pour expliquer le drame

Un pompier interroge la nourrice pour savoir ce qui s’est passé. Celle-ci évoque d’abord un malaise lié à une fausse route alimentaire. Puis elle lui explique qu’après avoir donné un biberon à l’enfant, elle l’a laissée un instant assise sur le bord de la table. Nahla aurait alors chuté au sol. Au même secouriste, l’assistante maternelle dira un peu plus tard que la tête de la petite a heurté le sol en parquet de la chambre où elle l’avait assise.
Évacué au CHU de Strasbourg-Hautepierre, le bébé décède le jour suivant. Le médecin légiste relève de graves lésions cérébrales provoquées par « un traumatisme crânien majeur avec impact occipital ». « Le mécanisme le plus vraisemblable pour rendre compte de la gravité des lésions constatées est un impact particulièrement violent de l’arrière-crâne du nourrisson sur un plan dur, conclut l’expert dans son rapport. Compte tenu des hémorragies rétiniennes bilatérales constatées, cet impact a été associé, précédé ou suivi d’épisodes de secousses très violents. »
Le légiste est catégorique : des lésions d’une telle ampleur ne sont pas compatibles avec une simple chute du nourrisson d’une position assise au sol. C’est pourtant la version que la nourrice commence par livrer aux gendarmes lors de sa garde à vue. Elle parle ensuite d’« une glissade » alors qu’elle tenait Nahla dans les bras pour aller la changer ; la tête du bébé aurait accidentellement heurté le rebord du lavabo.
La nounou finit par reconnaître qu’elle a eu « un geste brutal » avec le bébé. L’enfant était sur la table à langer de la salle de bains, elle n’arrêtait pas de pleurer. Excédée, la nourrice l’aurait saisie par le buste et projetée sur le plan de travail en carrelage situé entre les deux vasques. Durant toutes ses auditions ultérieures, l’assistante maternelle d’origine béninoise reviendra sur cette version des faits, allant jusqu’à accuser les enquêteurs d’être racistes et de lui avoir extorqué ses aveux.
Le juge d’instruction strasbourgeois chargé du dossier, Marc Picard, a organisé pas moins de quatre reconstitutions sur la base des différents scénarios énoncés par la jeune femme. Aucun, hormis celui correspondant à ses aveux durant la garde à vue, ne coïncide avec les éléments médico-légaux. Ce qui fait dire au magistrat que la nourrice a multiplié les « mensonges » et les « manipulations ».
Manipulatrice, la mère de deux enfants l’est assurément selon l’une de ses collègues entendue au cours de l’enquête. Elle n’aurait pas hésité à utiliser une pommade spéciale pour faire désenfler la lèvre d’un bébé qu’elle aurait frappé et ainsi dissimuler son geste aux parents (lire l’encadré ci-dessous).

Des rapports élogieux

La nourrice a indiqué qu’elle était épuisée au début de l’année 2014. Elle rencontrait en outre de grandes difficultés pour nourrir la petite Nahla, qui régurgitait beaucoup. Les cris de l’enfant la mettaient également en difficulté. L’assistance maternelle n’a cependant jamais alerté les services de la protection maternelle et infantile (PMI), dont la puéricultrice référente de son secteur géographique a établi plusieurs rapports louant ses compétences et son professionnalisme.
Incarcérée à la maison d’arrêt de Strasbourg depuis vingt-huit mois, la nourrice vient d’être renvoyée par le juge Picard devant la cour d’assises du Bas-Rhin pour violences ayant entraîné la mort sans intention de la donner sur un mineur de moins de quinze ans par personne ayant autorité. Elle encourt trente années de réclusion criminelle. Son procès, dont les dates ne sont pas encore fixées, devrait se tenir en fin d’année ou début 2017.

http://www.dna.fr/faits-divers

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