mardi 17 janvier 2017

Charente : elle a subi les sévices corporels de son fils et son époux pendant 40 ans

Quarante ans d’une vie marquée par la violence. Jeudi, la cour d’assises de la Charente se penchera sur le cas de cette femme de 68 ans battue, violée par son époux, maltraitée par son fils. Une violence devenue ordinaire dont Albert Delavergnas, 73 ans, devra répondre devant la cour. Il sera seul face au tribunal. La victime se reconstruit dans une maison de retraite et ne pourra être présente pour des raisons de santé. Le fils du couple, également accusé de violences volontaires sur ascendant, s’est donné la mort il y a un an, à sa sortie de détention provisoire.
Durant ces deux jours de procès, il va falloir comprendre pourquoi cette femme a subi, sans rien dire, les multiples sévices de son époux. Pourquoi, elle a accepté ces relations sexuelles sans son consentement. Pourquoi son propre fils est passé de spectateur à acteur. Pourquoi, dans le voisinage, personne n’a osé parler jusqu’à cette lettre anonyme envoyée au parquet de la Charente courant 2013.
Un drame qui s’est tenu à l’abri des regards dans cette maison de Montemboeuf pendant quatre décennies mais que Me Laure-Anne Lucas, avocate de la victime, ne voulait absolument pas voir juger à huis clos. « Tout le monde le savait mais personne n’a rien fait. Il faut que ces violences intra-conjugales soient racontées », insiste-t-elle

"Précarité totale"

Les coups tombaient pour rien. D’une gifle si la soupe n’était pas prête, à la rouste quand elle n’était pas assez vite servie. « Il utilisait une sorte de trique », ajoute Me Lucas. Un souffre-douleur sur lequel Albert Delavergnas passait ses nerfs. Les viols seraient arrivés dans les derniers temps. « Pas par punition mais juste pour assouvir ses pulsions sexuelles », précise l’avocate. Le fils, lui, aurait participé à cette perte de dignité en distribuant les coups. Son suicide ne laisse aucune trace de cause à effet.
À Montemboeuf, le couple vivait à part. La victime, mère au foyer, n’avait pas de contact avec l’extérieur. Elle n’avait pas de voiture, pas d’ami. Son époux était pépiniériste. « Un homme tout à fait inséré, ajoute Me Lucas. Qu’on ne nous avance pas le misérabilisme, ce serait trop réducteur. » Pour Me Véronique Chabrier, avocate de la défense, l’histoire s’est précisément construite dans une « précarité totale, un manque de repère éducatif », une ruralité dans ce qu’elle a de plus régressif. « Pour lui, le viol entre époux n’existe pas, précise-t-elle. C’est triste mais le niveau intellectuel est extrêmement bas. Ils vivaient dans un autre siècle. » Pour preuve, leur deuxième enfant a été élevé par les grands-parents et est actuellement placé sous tutelle.
Aujourd’hui, la victime s’est murée dans un silence énigmatique. « Elle ne montre aucune colère, explique Me Lucas. Est-ce qu’elle a trop souffert pour ne plus être capable de montrer sa souffrance ? Elle en a parlé spontanément lorsqu’elle a été auditionnée. Elle a déposé son fardeau. C’est quelqu’un qui a toujours été fragile. »
Totalement sous emprise, elle n’aurait pas jugé utile de déposer plainte, de sortir de cet enfer. Les experts psychologues devront répondre à ces questions. Le verdict devrait être rendu au plus tard vendredi.

http://www.sudouest.fr/2017/01/17/sordide-huis-clos-familial-3112342-1003.php

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