mercredi 26 avril 2017

Double meurtre de Montigny-lès-Metz: Quand Patrick Dils se retrouve, de nouveau, accusé

Si deux enfants n’étaient pas morts, la tête fracassée à coups de pierre, on pourrait comparer l’affaire de Montigny-lès-Metz (Moselle) à un jeu de chamboule-tout. Comme si, procès après procès, il fallait ramasser chaque protagoniste tombé avant de le replacer, au hasard, pour reconstituer une pyramide forcément instable.
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Ce mercredi, c’est donc avecPatrick Dils que les avocats ont joué. Tombé, en 1987, pour le double meurtre des enfants, il a passé quinze ans en prison avant d’être acquitté, en 2002. Les soupçons s’étant, depuis, portés sur Francis Heaulme, c’est donc en simple témoin qu’il était appelé à intervenir par visioconférence. Mais l’écran de télévision sur lequel il est apparu, vers 13h30, a vite pris des allures de box des accusés.
« Pendant 15 ans, le seul meurtrier, c’était vous ! »
« Je ne sais pas trop quoi vous dire… », attaque d’emblée celui dont les oreilles décollées encadrent toujours des cheveux roux coupés en brosse. « Comprenez-vous que les familles des victimes ont toujours des doutes ? », interroge alors doucement l’une des avocates des parents du petit Alexandre. « Oui. Mais il ne faut pas oublier que j’avais la pression, que j’avais 16 ans quand je suis passé aux aveux… »
Tout le monde s’en souvient. Mais on juge utile d’en relire les passages les plus croustillants. Celui où Patrick Dils désigne les pierres ayant servi à tuer. Celui aussi où il parvient à dresser un plan précis du talus sur lequel les corps ont été retrouvés. Le fameux plan circule dans le prétoire quand le témoin réalise. « Mais on est en train de refaire mon procès à nouveau, là ? » A la barre, l’avocate répond à sa manière. « Pour les parents, pendant quinze ans, le seul meurtrier c’était vous ! »

« Il y a des gens qui ont perdu leurs enfants. C’est embêtant… »
Aujourd’hui il est papa de deux petites filles, mais Patrick Dils le sait. Il a fallu trois procès pour le faire sortir d’une détention où il a connu « le racket », les « tabassages en règle » et les « viols à répétition ». Pas de quoi émouvoir Francis Heaulme qui, depuis le vrai box des accusés, assiste à l’audience en spectateur impassible, les bras croisés.
Ce sont d’ailleurs ses trois avocats, trop heureux de détourner les yeux des jurés de leur célèbre client, qui s’en prennent alors au témoin.Liliane Glock attaque en sortant le rapport d’un psychiatre dans lequel Patrick Dils réitère ses aveux. « Vous n’aviez pas la pression des policiers, là ? », questionne-t-elle. N’obtenant pas de réponse, elle se lâche : « Je ne suis qu’une avocate… Mais ici, il y a des gens qui ont perdu leurs enfants. C’est embêtant. »
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« Accepteriez-vous de venir pour être interrogé ? »
Les pierres refont surface dans le débat. Le plan du talus aussi. « Mais c’est pas possible, c’est pas vrai, souffle Patrick Dils, depuis Bordeaux où il vit aujourd’hui. Ça commence à devenir du grand n’importe quoi. » Mais, parties civiles ou défense, l’entreprise de démolition est collective. Et Stéphane Giuranna, autre avocat de Francis Heaulme, n’est pas du genre à faire dans la dentelle. « Accepteriez-vous de venir physiquement au procès pour être interrogé ? Vous devez au moins ça aux familles des victimes… »
« Mais j’ai une vie professionnelle. J’ai une famille aujourd’hui, balbutie celui dont le statut est devenu instable en l’espace de trois heures. Il faut que j’en parle à mon avocat. » Patrick Dils ne sait pas que le code de procédure pénale n’accorde pas d’avocat aux témoins. Tout comme il l’oblige à dire « la vérité et toute la vérité » En somme tout l’inverse de Francis Heaulme qui, ce mercredi, a fait oublier à tout le monde qu’il était celui qui encourt, lors de ce procès, une peine de réclusion à perpétuité.

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