mardi 26 octobre 2010

Un tuerie familiale à Madagascar au coeur d'un procès d'assises à Paris

Une famille décimée à Madagascar, des témoins se disant menacés de mort, un premier procès annulé in extremis à la Réunion : tel est le contexte peu banal du procès qui s'est ouvert mardi pour assassinats devant la cour d'assises de Paris.


Les faits remontent au 22 avril 2001. Dans la banlieue d'Antananarivo, cinq membres de la famille Remtoula, des Français d'origine indo-pakistanaise, sont tués à l'occasion d'une réunion de famille par des hommes qui ont fait irruption sur la terrasse de leur maison et tiré avec des armes de guerre. Trois adultes et deux adolescents périssent, tandis que cinq autres personnes sont blessées.


Cette tuerie provoque alors un grand émoi dans la communauté des "karanas", Malgaches d'origine indo-pakistanaise, musulmans chiites, dont la plupart ont choisi la nationalité française à l'indépendance de la Grande Ile.


Une première enquête n'ayant pas abouti à Madagascar, la famille des victimes porte plainte à la Réunion auprès de la justice française.


L'enquête entraîne l'arrestation de Mamode Abasse Mamodtaky, un Malgache accusé d'avoir commandité et participé à la tuerie, et de ses deux beaux-frères, le Pakistanais Babar Ali Yohan et le Réunionnais Riazhoussen Damdjy. Ce dernier, gérant d'une station-service, est soupçonné d'avoir recruté un de ses employés réunionnais, Jean-François Crozet, le seul à avoir avoué sa participation au commando.


Selon l'accusation, c'est Mamodtaky qui aurait commandité le massacre suite à un différend conjugal et financier avec son ex-épouse, Anita Remtoula.


Les quatre accusés comparaissent lors d'un premier procès en février 2009 à Saint-Denis de la Réunion, mais celui-ci est annulé pour vice de forme par la cour d'assises locale qui, à la stupéfaction des victimes, relâchent les accusés.


Le 11 juin 2009, la Cour de cassation infirme cette décision et ordonne la tenue d'un nouveau procès, à Paris cette fois.


Alors que Babar Ali Yohan est toujours en fuite, la justice a remis la main sur les trois autres, qui comparaissent détenus. En début d'audience mardi, la cour d'assises de Paris a rejeté leurs demandes de remise en liberté, estimant qu'il existait "un risque sérieux qu'ils repartent sans laisser d'adresse".


De l'aveu même de la présidente, Laurence Turbe-Bion, le procès, qui doit durer trois semaines, s'annonce "complexe". La cour est en effet "tributaire des visio-conférences" organisées de la Réunion, mais surtout de Madagascar, à trois heures de décalage horaire de Paris.


"Il faut qu'ils fassent des efforts", a indiqué la présidente en parlant des autorités malgaches. "Ce n'est pas du tout pour les mépriser mais ils ne sont pas du tout au même niveau que nous. Il faut qu'on les bouscule. Déjà que notre +visio+ à nous, elle ne marche qu'une fois sur deux..."


Outre ces problèmes techniques, la cour d'assises devrait rencontrer une kyrielle de difficultés avec la cinquantaine de témoins et d'experts cités. Entre une magistrate qui serait décédée, un gardien sourd-muet qui ne maîtrise pas la langue des signes et un médecin-colonel qui a demandé une protection pour venir en France, la partie ne s'annonce pas facile.


Surtout, a expliqué l'avocat d'une des parties civiles, Me Jean-Michel Baloup, certains témoins "risquent leur vie". "Un des vrais problèmes de ce dossier, c'est celui des menaces."


Des allégations qui n'ont pas manqué de hérisser la défense. "Est-ce que j'ai fait du mal à qui que ce soit? Non!", a immédiatement réagi le principal accusé Mamode Abasse Mamodtaky.


Verdict attendu le 19 novembre.


http://www.lepoint.fr/societe/un-tuerie-familiale-a-madagascar-au-coeur-d-un-proces-d-assises-a-paris-26-10-2010-1254679_23.php

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