samedi 16 avril 2011

"Détourner et détériorer une voiture, cela mérite réparation"

Une voiture prêtée à un inconnu pour un "déménagement" puis volatilisée jusqu'à ce qu'une fourrière n'en ramasse la carcasse accidentée dans un couloir de bus à Aubervilliers. C'est ce qui est arrivé à Georges, artiste peintre, présent à la barre du tribunal correctionnel de Paris, en cet après-midi de printemps indécis.
- J'avais sympathisé avec G., que je rencontrai pour la première fois lors d'une soirée. À la fin de la soirée, G. m'a demandé de lui prêter ma voiture pour aider un ami à déménager. Il s'était engagé à me la rendre deux jours plus tard. N'ayant aucune nouvelle de lui, j'ai téléphoné au numéro qu'il m'avait donné. Je suis tombé sur un répondeur. J'ai insisté mais G. ne m'a jamais rappelé. Au bout d'une semaine, j'ai décidé de déposer plainte au commissariat. Et puis j'ai reçu l'avis de mise en fourrière de ma voiture...
La présidente note que le prévenu ne s'est pas présenté sans pour autant s'être excusé ni s'être fait représenter par un avocat. Dans ses déclarations consignées dans le procès-verbal de police, G. a assuré qu'il avait, d'un commun accord avec Georges, laissé la voiture à une tierce personne qui devait la rendre à son propriétaire.
"On a l'impression qu'il a inventé ce tiers pour écarter sa responsabilité à la suite de l'accident", doute la présidente. Faute de preuve, cette version pèserait du même poids que celle de Georges sans cet élément capital, sorti du chapeau par son avocat.
"Mon client n'est pas venu accuser G. pour se faire rembourser les frais de gardiennage, s'agace-t-il. Le véhicule a bien été accidenté alors qu'il était sous la responsabilité de G. Et je vais vous en donner la preuve tangible : c'est G. qui a rédigé le constat", affirme-t-il en présentant les documents au procureur.
Ces pièces proviennent de la compagnie d'assurance de G. Le tribunal les découvre à l'audience.
"Chose curieuse, poursuit l'avocat, les deux parties du constat sont remplies alors qu'il était fautif. Il n'est pas très courant de voir l'auteur responsable remplir la totalité d'un constat... L'accident était-il arrangé ? La question se pose, madame la présidente. En tout état de cause, nous sommes dans un cas d'abus de confiance. Détourner et détériorer une voiture à présent irrécupérable, cela mérite réparation."
Compte tenu de la valeur de la voiture acquise en 2008 pour 3 000 euros, il sollicite 5 000 euros au titre du préjudice lié au détournement et 2 000 euros pour le préjudice moral, outre le remboursement des frais de fourrière.
Ne mâchant pas ses mots, la procureure évoque la "personnalité irresponsable" du prévenu, déjà condamné pour abus de confiance et récidive de conduite d'un véhicule sans permis. Elle demande une peine de quatre mois de prison dont deux assortis d'un sursis avec mise à l'épreuve, la principale obligation étant d'indemniser la victime.
Probablement choqué par la légèreté dont la victime a fait preuve en prêtant son véhicule à un inconnu, le tribunal se montrera plus clément que les réquisitions en condamnant G. à quatre mois avec sursis, 2 500 euros et 200 euros au titre des préjudices matériel et moral, et le remboursement des frais de fourrière.
http://www.lepoint.fr/chroniques-ete-carnets-justice/detourner-et-deteriorer-une-voiture-cela-merite-reparation-15-04-2011-1319640_195.php

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