mardi 31 janvier 2012

Me Dupond-Moretti dépose à son tour une demande de dessaisissement des juges

On avait tendance à penser que le dossier instruit à Lille sur les suites de l'affaire du Carlton ronronnait doucement, en attendant que Dominique Strauss-Kahn, peut-être, vienne bientôt dans le Nord pour y être entendu. Hier soir, un cri a percé ce ronronnement. Celui d'Éric Dupond-Moretti, avocat de David Roquet : il demande le dessaisissement des trois juges lillois !

C'est pile au moment où les trois magistrats semblent desserrer leur étreinte que Me Dupond-Moretti leur saute dessus. Quelques jours après René Kojfer, son client vient d'être libéré en fin de semaine dernière. Mais hier soir, la collaboratrice du ténor lillois a déposé au parquet général une « requête aux fins de renvoi de l'affaire 10/11/10 devant une autre juridiction ». En clair, l'avocat de David Roquet souhaite que les juges soient dessaisis, et il y a trois raisons à cela.
D'abord, il estime qu'ils ont « fait preuve de déloyauté », en cachant à la défense des pièces de leur dossier. Il s'agit notamment de procès-verbaux d'auditions de certains participants aux rencontres désormais fameuses organisées autour de Dominique Strauss-Kahn, ce que reconnaissent implicitement les juges quand ils écrivent : « Les contenus des investigations en cours ne sont, pour leur part, pas connus des parties, et partant du public. » Colère de l'avocat : « La juge souhaite le maintien en détention de David Roquet à raison d'investigations connues d'elle seule ! » Il y aurait là comme un déséquilibre entre l'accusation et la défense... Second grief - et pas le moins sensible : « Les juges n'ont pas respecté des règles élémentaires de droit. » Il vise des qualifications différentes pour les mêmes faits, ou exagérées, comme la notion de bande organisée, qui ferait relever cette affaire de la cour d'assises, sur le principe. Ce que personne n'envisage sérieusement aujourd'hui.
Enfin, et c'est sans doute le plus piquant : « On assiste dans ce dossier à une dérive "puritaniste" extrêmement inquiétante. » Me Dupond-Moretti comprend assez mal l'intérêt de l'enquête quand on demande à son client ce que sont ses pratiques sexuelles en règle générale, ou s'il est adepte du sadomasochisme, par exemple.

« Tête de l'emploi ? »

Il s'étonne qu'on demande à Fabrice Paszkowski - qui a toujours affirmé n'avoir pas participé aux ébats collectifs de ses amis - s'il a une sexualité normale... « C'est une question terriblement inquiétante. Existe-t-il une sexualité judiciairement normale ? Moralement normale ?
» Il s'interroge quand, devant une photo prise « dans un hôtel plutôt chic », les juges évoquent la pose d'une jeune femme partie civile qui ne laisserait aucun doute sur sa profession : « Tête de coupable ? Tête d'innocent ? Tête de l'emploi ? » Et il peste : « Les trois jeunes juges d'instruction ont délibérément décidé de placer la morale au centre de leur réflexion. »En s'inspirant apparemment des talents de nos confrères caricaturistes pour fixer leur ligne : « Dans l'armoire forte qui contient le dossierfigure une caricature de M. Dominique Strauss-Kahn que M. Roquet a eu le loisir de contempler durant une partie de son interrogatoire, puisque la porte était grande ouverte. » L'histoire ne dit pas comment est caricaturé l'ex-ministre et, comme disait Brassens, « c'est regrettable, ça nous aurait fait rire un peu ».
http://www.lavoixdunord.fr/Region/actualite/Secteur_Region/2012/01/31/article_me-dupond-moretti-depose-a-son-tour-une.shtml

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