Cet automobiliste de Woincourt a-t-il commis un homicide involontaire sur un scooteriste qui roulait alcoolisé et probablement sans feux, une nuit de juin ? Le tribunal doit trancher.
D'un côté, Alexandre, de Valines, dans l'ouest de la Somme. Il est mort à 29 ans, le 28 juin 2010, à 23 heures, sur la route Eu-Abbeville. Il avait 3.07 grammes d'alcool par litre de sang. Son scooter au pot d'échappement trafiqué, d'après les témoins, n'était pas éclairé. Il ne portait pas de gilet de sécurité et accessoirement, n'était pas assuré.
De l'autre, Marc D., 43 ans, aucune mention au casier, douze points sur douze au permis. Ce soir-là, il rentrait chez lui à Woincourt. Il n'avait pas bu ni consommé de stupéfiants. Sa Suzuki noire était en parfait état. À la sortie de Valines, il s'est retrouvé derrière une voiture tractant une remorque de bois. Il a entrepris de la dépasser. «Pas très vite. J'étais à 70, il devait être à 90 », d'après le témoin.
En pleine ligne droite, la Suzuki percute le scooter. Alexandre passe par-dessus la voiture. Un gendarme réserviste stoppe net et trouve la victime. «J'ai senti le pouls mais il était fuyant. J'ai vu que l'artère fémorale était coupée », se souvient-il. Le motocycliste meurt avant l'arrivée de secours.
Marc est formel : «Il n'était pas éclairé. Je l'ai vu au dernier moment. Il était au milieu de sa voie de circulation. J'ai serré à droite mais au lieu de se rabattre, quitte à partir dans le talus, il est venu vers moi ». L'homme que Marc doublait accrédite cette thèse : «Nous étions tellement proches que je voyais à travers la vitre de la Suzuki. Je ne peux pas être formel mais pour moi, il n'avait pas de lumière ».
« Une faute infime »
Les gendarmes ne retrouveront pas de phare dans les débris épars du scooter. «Ils ne mettront pas non plus la main sur le moteur », objecte Me Fontaine-Crépin, pour qui Alexandre aurait pu être muni sinon d'une optique, au moins d'une ampoule de remplacement.
En revanche, les enquêteurs notent que le commodo est en panne, bloqué sur «arrêt ». Surtout, ils trouvent chez la mère de la victime toute la coque avant de l'engin, comme en attente de réparation.
Delphine Fontaine-Crépin parle de la douleur d'une maman, qui n'est pas moins forte parce que le mort a transgressé le code de la route : «Il y a un mot pour celui qui perd un parent, c'est orphelin. Un mot pour celui qui perd un conjoint, c'est veuf. Mais il n'y a pas de mot pour celle qui perd son fils. Parce qu'alors, on n'est plus rien ».
« Je regrette. Je pense à la famille tous les jours depuis », commente Marc. Son avocat Stanislas de la Royère plaide résolument la relaxe. «Quel que soit le conducteur, cet accident aurait eu lieu, explique-t-il. Le responsable est clairement le pilote du scooter. »
À l'audience de la semaine dernière, la procureur parle de «faute infime », de tragédie «qui peut arriver à tout le monde » et ne requiert qu'une amende, pas même une légère suspension de permis.
La mort d'un homme doit-elle à tout prix trouver un épilogue judiciaire ? C'est finalement à cette question que répondront les juges amiénois, dans le délibéré qu'ils rendront le 21 mars prochain.
http://www.courrier-picard.fr/courrier/Actualites/Info-regionale/Accident-mortel-en-justice
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