lundi 1 octobre 2012

Gironde : accusé d'avoir éborgné son rival

«Je me suis défendu, je n'avais rien d'autre pour me défendre ». Patrick Faure, habitant de Lagorce de 58 ans, est jugé depuis hier par la cour d'assises de la Gironde pour violences avec arme ayant entraîné une mutilation ou une infirmité permanente. Le 23 mai 2008, suite à un échange de coups survenu à Guîtres, atteint par un panneau de bois, Dominique Serres, demeurant à Sablons, avait perdu un œil sorti de son orbite.
Ce qui était d'abord apparu comme une altercation entre automobilistes irascibles, commencée devant la quincaillerie de Guîtres, cachait une autre cause. Patrick Faure, menuisier qui allait livrer un client, avait été suivi en voiture par Dominique Serres. L'accusé entretenait depuis peu une relation amoureuse avec la femme de ce dernier, rencontrée lors de parties de chasse dominicales.

Le ressenti et les versions des deux hommes sur cet accrochage divergent. La cour et les jurés se sont donc attachés hier à mieux cerner le contexte de ces violences et en sont rapidement venus aux faits.
Visualiser la scène
Cheveux blancs, doigt de la main droite amputé, stigmate d'un grave accident du travail, l'accusé est décrit, notamment par le maire de Lagorce qui enchaîne les banalités à la barre, comme « un artisan hors pair, sérieux », « un administré sans problème, serviable ». Ses compétences et son caractère tranquille sont unanimement soulignés par les témoins qui défilent.
Devant les questions indiscrètes, voire intrusives, de l'avocat de la partie civile, Me Jean-David Boerner, et les soupirs ostentatoires et mimiques indignées de l'avocat de la défense, Me Jean Gonthier, le président Éric Veyssière rappelle que l'audience ne se tient pas devant le juge aux affaires familiales.
Passé à la question par Me Jean-David Boerner, l'accusé se raidit et peine à répondre. L'exercice devient vite un supplice. L'avocat veut visualiser la scène seconde par seconde. Qui a frappé le premier ? Pourquoi ne pas avoir parlementé ? « C'est moi qui ai été agressé au départ », s'insurge l'accusé. « Le problème c'est qu'il ne m'a pas parlé. Il a tout de suite tapé avec un piquet de chasse (1). Et il revenait toujours vers moi. Ce n'est pas immense mais c'est acéré. Je me suis défendu ». Il n'en démord pas. Une ligne de défense légitime.
« Ce piquet de chasse est maniable et tranchant », assure son avocat, Me Jean Gonthier, en demandant que les deux « armes » classées pièces à conviction soient présentées à la cour. Les jurés, surtout les bricoleurs, soupèsent la planche, palpent les côtés du piquet, comparent les tailles.
Si Patrick Faure se retrouve dans le box des accusés, c'est que jusqu'à présent la justice a estimé, en substance, qu'il avait bien riposté à une agression, mais que la forme prise par cette contre-attaque était disproportionnée. D'emblée, l'avocat général, Dominique Hofflack, donne le ton de ses réquisitions à venir. Il veut acculer l'accusé en martelant : « Vous étiez en danger de mort ? Il avait un calibre ? Un couteau ? Quelque chose qui pouvait vous ôter la vie ? Ce n'est pas de la légitime défense ! Il a fallu des coups d'une extrême violence pour l'énucléer ! ».
Le verdict est attendu demain.
(1) Petit piquet de bois surmonté d'une plaque métallique numérotée qui marque le poste de chasse dans les battues.

http://www.sudouest.fr/2012/09/27/je-me-suis-defendu-832834-2903.php

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