vendredi 5 octobre 2012

L'escroc condamné

Après plusieurs renvois, qualifiés de «manœuvres dilatoires» par la présidente Élisabeth Gadoullet, Stéphane Duteil a enfin comparu devant le tribunal correctionnel. L'homme a déjà usé plusieurs avocats, qui ont dû demander des renvois, faute de pouvoir plaider, n'ayant pas été payés.
Stéphane Duteil, dont les victimes attentaient le procès avec impatience, était prévenu pour banqueroute, faillite personnelle, faux et usage, abus de biens sociaux, abus de faiblesse sur personnes vulnérables, abus de biens à des fins personnelles, destruction de bien d'autrui. «Tout commence en 2002, explique la présidente. Vous avez, en fait, profité de la notoriété de vos beaux-parents, très connus et respectés à Laloubère, pour créer la société Brua, dont vous avez rapidement pris la gérance. Une fois que vous l'avez dépecée, vous avez créé la société Duteil Promotion, que vous avez coulée aussi.» Le principe est celui, bien connu, de la cavalerie : on pompe la première société jusqu'à la moelle pour remplir la seconde et ainsi de suite. Quand la société est à terre, les actifs ont disparu et ne restent que les passifs, laissant les créanciers sans remboursement. Stéphane Duteil a, d'après le dossier d'instruction plus épais qu'une banquise, profité de sommes considérables versées sur le compte de la société Brua à des fins personnelles. Les sommes, de près de 2 millions d'euros au total, se retrouvaient sur son compte perso ou celui de son épouse, Chantal Brua : «D'aucuns s'en viennent gendres à Lourdes, ironisait une partie civile. Lui, il est venu gendre à Laloubère. Et ce n'est pas étonnant, si le régime matrimonial est celui de la séparation des biens. C'est bien plus commode».

Des abus de confiance

La société Brua, comme la société Duteil, faisait de la promotion immobilière : les sommes déposées par les clients n'arrivaient jamais sur les comptes sociétaux mais sur les comptes persos. «Plus ignobles encore, si l'on peut monter les marches de l'abject, sont les abus de confiance», lance la procureure Éliane Markovitch. En effet, profitant toujours de la notoriété de ses beaux-parents, Stéphane Duteil approche une vielle dame de 86 ans, amie de la famille Brua : il lui fait signer une promesse de vente pour un immeuble situé juste en face de son habitation, immeuble dont elle se réservait le rapport en cas de coup dur. La promesse signée, Duteil s'installe avec son matériel, démolit le rez-de-chaussée, loue l'appartement du 1er étage et y entreprend des travaux. Alors qu'il n'est pas propriétaire. L'acte véritable ne sera jamais signé. Mais il va encaisser plus de 8.000 € de loyers. Quand le notaire avertit la vieille dame, Duteil réplique par une lettre recommandée, lui enjoignant de payer les travaux réalisés, pour près de 48.000€. Travaux qu'elle n'a jamais demandés. Ce n'est pas tout : deux ans presque jour pour jours après cette entourloupe, Duteil propose un viager à une autre vieille dame qui possède un immeuble sur un terrain qui l'intéresse pour bâtir un lotissement. Il s'engage à verser un viager de 800 € par mois et à reloger la retraitée : il trouve un appartement, mais cesse rapidement de payer loyer et viager. Le légitime propriétaire vient alors réclamer son dû et la vieille dame se retrouve à la rue, presque sans ressources et sans maison, puisque Duteil l'a fait démolir entre-temps, alors qu'il n'est en rien propriétaire.

Deux ans avec sursis

Les dénégations et la mauvaise foi du prévenu ne feront qu'agacer le tribunal et plus encore la procureure qui aura des mots très durs avant de réclamer 4 ans de prison dont 2 avec sursis et obligation d'indemniser les victimes et de régler les passifs. Pour la défense : «Duteil n'est pas le monstre que l'on dépeint. Il était entouré d'un notaire, d'un comptable, d'un architecte et d'une banque. L'élément central dans ce dossier, c'est le notaire. Et il n'est pas là. Il faut un peu de moralité, tout de même». Cette dernière pirouette énerve la présidente au dernier degré : «Je ne pense pas que M. Duteil soit le bienvenu pour parler ici de moralité». Stéphane Duteil, qui travaille aujourd'hui pour la mairie de Tarbes, au service des sports, a été condamné à 2 ans de prison avec sursis et à rembourser des sommes conséquentes : 1.500€, 2.500€ au titre de l'article 475-1 ; 3.000€, 47.925€ et 57.396€ pour les victimes. Sa faillite personnelle a été prononcée pour dix ans.

http://www.ladepeche.fr/article/2012/10/02/1454230-laloubere-l-escroc-condamne.html

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