dimanche 23 décembre 2012

Le facteur ne sonnera pas deux fois

On est dans la quatrième dimension », soupire Rémi Coutin, le vice-procureur. Peine perdue. Le prévenu s’obstine. « Ma requête était légitime. Je ne vois pas pourquoi la Poste n’en a pas tenu compte ! ».
Sa requête ? Que le facteur mette un peu moins d’entrain dans ses coups de sonnette matinaux, qu’il dose mieux sa pression. « Mais ça veut dire quoi ? », s’exaspère la présidente Catherine Hologne. « Qu’il sonne correctement », persiste et signe le trentenaire. Dialogue de sourds.

Promesse d’un sourire tout neuf !

Cet habitant de la rue du Portugal à Vandœuvre affiche un caractère pour le moins… atrabilaire. Excédé par le passage sonore du facteur en charge de recommandés, il lui intime donc de faire moins fort. Avant d’en faire la demande officielle au siège de la Poste. L’établissement pour couper court aux récriminations de ce client à l’ouïe sensible donne l’ordre à ses agents de zapper le coup de sonnette, de se contenter de déposer les avis de passage dans la boîte aux lettres.
La consigne ne plaît pas davantage à l’intéressé qui se déplace à nouveau dans les locaux de la Poste, le 28 août dernier, pour menacer le facteur en question, taxé de « connard » au passage, de lui « refaire les dents ».
C’en est trop. Plainte est déposée. Et l’homme à l’oreille musicale se retrouve à la barre du tribunal correctionnel de Nancy. « J’ai deux enfants en bas âge, je passe parfois des nuits difficiles », n’en démord pas le prévenu. Bref, les coups de sonnette impétueux l’agacent. Et sa colère lui font promettre des sourires neufs. Mais, depuis, promis, tout est oublié… « On s’est expliqué avec le facteur, et excusé réciproquement ! », lâche-t-il sans rire.

400 € d’amende

« Vous posez des postulats de départ avec lesquels on ne peut pas être d’accord », tente encore Catherine Hologne au bord de la crise de nerfs. « La colère n’est pas une circonstance atténuante… Quand à l’intensité des coups de sonnette… », renonce-t-elle.
Elle se tourne vers le facteur, un rien goguenarde : « Vous avez des formations pour ne pas déranger les usagers ? ». « On ne peut pas codifier nos coups de sonnette selon les clients », répond-il.
« Mais bon, désormais, j’ai compris. Avec ce monsieur, je donne un petit coup. En revanche, mes remplaçants, eux, n’osent plus passer lui remettre ses recommandés, ou alors à deux ! ».
« J’en étais resté aux facteurs qui se faisaient mordre par les chiens. C’est décidément un métier difficile », n’en revient toujours pas le vice-procureur.
« Les redresseurs de tort qui donnent des leçons sur les façons de sonner, avec un tel palmarès, je n’en peux plus… », siffle la présidente à la lecture des mentions figurant sur le casier du Vandopérien. On trouve un peu de tout dans ces 7 condamnations, une affaire de stupéfiants… mais aussi et surtout des outrages à des personnes dépositaires de l’autorité. « J’ai l’impression que vous avez des problèmes avec les uniformes ! », tance le représentant du parquet, Rémi Coutin. Il requiert 400 € d’amende. Le tribunal le suit.
Le facteur énergique n’a demandé nulle réparation sonnante… et trébuchante. Histoire, sans doute, de ne pas chauffer un peu plus encore les oreilles du Vandopérien.

http://www.estrepublicain.fr/justice/2012/12/15/le-facteur-ne-sonnera-pas-deux-fois

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