dimanche 3 mars 2013

Dans l'antichambre des comparutions immédiates

La Dépêche du Midi a passé trois jours au sein du service de traitement direct du parquet près du tribunal de grande instance de Toulouse, la tour de contrôle de la justice.
«Sur cet écran figure l'ensemble des gardes à vues en cours dans le département», explique un magistrat du parquet en regardant l'écran d'un ordinateur où figurent vingt-cinq lignes : les noms des responsables d'enquêtes, les 25 identités des gardés à vue pour 25 affaires en cours…
Quatrième étage du tribunal de grande instance de Toulouse, badge obligatoire pour accéder au service du parquet. Ici se décident les suites de chaque infraction pénale constatée dans le département. Les sonneries de téléphones font concurrence aux bruits des fax… Les deux magistrats de permanence au service de traitement direct, le STD, jonglent entre les gardes à vues, les nouvelles affaires où il faut rapidement décider des suites à donner, les classements sans suite ou les dossiers qui se terminent et vont faire l'objet de poursuites (lire l'encadré).
Au téléphone, un enquêteur. Une garde à vue est en cours après des dégradations sur un fourgon. Le suspect a été interpellé. Cet homme, sans casier, nie. Le magistrat lève la garde à vue mais fait convoquer le contrevenant devant le tribunal correctionnel pour dégradations.
10 h 30, courte pause des appels. Le procureur de permanence contacte un enquêteur sur des violences conjugales. L'homme aurait utilisé un marteau. Les policiers doivent faire vite. Le parquetier veut présenter l'homme à l'audience de comparution immédiate de l'après midi. Rachid, 35 ans, a été interpellé chez lui. Sa femme a été frappée et menacée avec un marteau devant ses enfants…. L'homme reconnaît à demi-mot. Un œil sur le code Pénal, le magistrat choisit la qualification de l'infraction, les circonstances aggravantes, la récidive légale, la composition citoyenne… Déjà condamné une fois, Rachid encourt la peine plancher et un an de prison, ferme.
Gravité des faits, violence employée en présence des enfants, le magistrat choisit la comparution immédiate. À l'audience, sans nouvelle du marteau, la présidente Rivière abandonne la circonstance aggravante de l'arme. À l'issue des débats, pendant le délibéré, les magistrats pèsent tout… Rachid n'ira pas en prison. Six mois de prison dont trois avec sursis mise à l'épreuve.

Deuxième jour au STD

Entre deux appels des enquêteurs, les magistrats expliquent : «Le renvoi en comparution immédiate dépend de la gravité des actes et des antécédents judiciaires. Ce sont des faits importants qui nécessitent une réponse pénale immédiate. Nous sommes garants de l'ordre public et de la sécurité des victimes. Une victime qui vient de subir des violences ne souhaite pas croiser l'auteur dans la rue le soir même».
Deux dossiers sont déjà prévus pour l'audience de l'après midi. Comme à chaque fois, les prévenus sont déférés devant le procureur puis rencontrent l'enquêtrice de personnalité et leurs avocats dans les geôles, dans les sous-sols du palais de justice.
Asmaïl, 34 ans, comparait après 48 heures de garde à vue. Trois jours plus tôt, il s'est saoulé, est rentré chez lui à 6 heures du matin. Il n'avait pas les clefs, il a mis le feu à la porte !
À l'audience, les trois juges plus deux citoyens assesseurs le condamnent à 1 an de prison avec sursis mise à l'épreuve. Il ressort libre.

Troisième jour au STD

Un procureur remarque : «C'est calme ; il n'y a aucun enquêteur en attente…» Les membres du parquet traitent une centaine d'appels par jour.
En fin de matinée, la tension monte, les deux magistrats de permanence reçoivent tour à tour deux personnes qui passent en comparution immédiate l'après-midi. Au même moment, des gendarmes appellent, un automobiliste a été arrêté avec 1,03 gr d'alcool dans le sang. Sylvain, 32 ans, un des deux prévenus déférés le matin, entre dans le box de la salle des comparutions immédiates. Son ex-compagne a dénoncé 3 heures de violences. Les juges, frappés par la nature des humiliations et le nombre de coups, sévissent : 24 mois de prison pour Sylvain. Il est parti directement en prison.

http://www.ladepeche.fr/article/2013/03/03/1573813-dans-l-antichambre-des-comparutions-immediates.html

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