mercredi 29 janvier 2014

Jean-Claude Andruet, en quête de vérité depuis 19 ans sur le meurtre de son fils

Depuis 19 ans, le champion de rallye Jean-Claude Andruet s’évertue à découvrir la vérité sur la mort de son fils Gilles, génie des échecs tué en août 1995, sur fond de dettes de jeux. le 2e jour du procès de Sacha Rhoul s’ouvre aujourd’hui
«J’ai eu Gilles à 17 ans», raconte Jean-Claude Andruet au deuxième jour du procès à Evry de Sacha Rhoul, un ancien jet-setteur franco-marocain accusé d’avoir participé au meurtre de son fils.
A 73 ans, l’homme aux cheveux grisonnants se rappelle l’enfance heureuse de son fils aîné: «J’étais à la fois son père - et ce n’est pas parce que j’étais jeune que je n’avais pas d’autorité - et un copain».
Dès qu’il rentre de ses compétitions internationales, Jean-Claude Andruet, séparé de la mère de Gilles quand celui-ci avait neuf ans, se précipite voir son fils. Dans sa carrure légèrement voûtée, on devine le corps de l’ancien sportif.
Le pilote automobile dispute à l’époque de nombreuses courses, de Monte-Carlo aux 24 heures du Mans. Son ami Jacques-Marie Bourget, journaliste à Paris-Match, parle d’un «type capable, en pleine course, d’aller dans les champs pour éviter un chat ou un chien».
Celui qu’on surnomme «La Panique» dans le milieu automobile commence à travailler comme représentant dans l’industrie. Dès l’achat de sa première voiture, à 18 ans, il se passionne pour la course automobile.
«Je m’entraînais avec mon Audi, et puis je me suis lancé en 1965, j’ai été sacré champion de France des aspirants», se souvient-il avec fierté.
Mais dès qu’il évoque son fils Gilles, le regard de Jean-Claude Andruet se brouille, la voix se casse.
Le vainqueur du rallye Monte-Carlo 1973 évoque un enfant «tranquille, brillant à l’école, doux»: «je n’ai jamais vu quelqu’un avec un tel cerveau». Gilles sera consacré grand maître international d’échecs en 1982 et champion de France en 1988.

Fils prodigue

Fort de son don pour le calcul et d’une mémoire infaillible, Gilles commence à jouer au black-jack. «Au début du jeu, la chance lui a souri. Il avait gagné plus de 600.000 francs une fois... C’est quand il a touché à la drogue qu’il a changé...».
Le champion d’échecs accumule les dettes et les contraventions - reçues par son père qui a la voiture à son nom.
Face à cette fièvre du jeu, Jean-Claude Andruet se fâche: «pendant trois ans, nous ne nous sommes plus parlé, je ne sais pas ce qu’il a fait». Et puis un jour, le fils prodigue insiste pour parler à son père.
Ce dernier accepte de le rencontrer le lendemain. Gilles lui confie ses soucis d’argent et il se réconcilient. Ce sera la dernière fois qu’ils se voient, un mois avant le meurtre.
Le cadavre de Gilles, 37 ans, est retrouvé le 22 août 1995 enveloppé dans une alèse imbibée de sang et baignant dans l’Yvette, un cours d’eau de l’Essonne.
Au cours de l’enquête, les soupçons se posent sur trois hommes: Joseph Liany condamné en 2003 avant d’être acquitté en appel, Loïc Simon, qui s’est donné la mort, et Sacha Rhoul, le neveu de Joseph Liany.
«C’est la première fois que je vois Sacha Rhoul», indique Jean-Claude Andruet en marge du procès.
Le champion de rallye s’est battu pour obtenir que celui-ci comparaisse devant la justice française pour le meurtre de son fils. En fuite au Maroc lors d’un premier procès et condamné à 15 ans de prison en son absence, Sacha Rhoul est extradé vers la France en mars 2010.
Aujourd’hui, face à l’accusé, le père de la victime ne sait plus quoi penser: «il y a de fortes probabilités pour que le troisième homme soit Sacha, mais vous savez, je suis naïf, et en cela, Gilles tenait de moi».
Devant la cour d’assises de l’Essonne, l’avocat général ne cesse de rappeler la douleur de ce petit homme massif sur le banc des parties civiles, qui semble porter la mort de son fils sur ses épaules et qui, parfois, a le regard dans le vague.

http://www.leprogres.fr/france-monde/2014/01/29/jean-claude-andruet-en-quete-de-verite-depuis-19-ans-sur-le-meurtre-de-son-fils

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