mardi 21 janvier 2014

La courageuse victime de Penin lui fait face

Sylvia Peromingo, 34 ans, est venue raconter à la barre de la cour d’assises de Douai comment elle a réussi à échapper à la mort en parlant avec son agresseur, qui l’a retenue captive deux heures durant.
«Je faisais mon jogging dans le parc du Mont-Valérien, à Suresnes, avec ma mère et son copain. J’ai eu un point de côté, j’ai ralenti. Je me suis retrouvée dans un coin désert. Il était accoudé à la rambarde… » Ce 20 mai 2004, il y a près de dix ans, Sylvia Peromingo, 34 ans aujourd’hui, l’a revécue hier en témoignant devant la cour d’assises de Douai (Nord) où s’ouvrait le procès d’Alain Penin. « J’ai voulu faire demi-tour, poursuit-elle, il transpirait la bizarrerie… Il m’a tout de suite étranglée, en me disant : si tu cries je te tue. Il avait un tournevis et un couteau. » La suite, ce sont les deux heures que prend Alain Penin pour la violer. « Votre force, note la présidente Catherine , ça a été de lui parler… » « J’ai décidé de ne pas l’énerver, acquiesce la jeune femme au visage coquet, droite à la barre. Je me suis dit que s’il me répondait, c’était gagné. » Alors elle lui parle, « de tout, de rien, ça a , parce que je suis là aujourd’hui ».

La jeune femme, face à celui qui « a bousillé neuf ans de ma vie », est là pour témoigner d’une chose : « J’ai vu la
dans ses yeux. J’ai tout de suite vu que ce n’était pas juste un viol. Il avait tout prévu, les deux armes… » Alain Penin, montagne de chair dans un haut de jogging jaune poussin, crâne rasé sur un bouc gris, lunettes sur le nez, reste étrangement impassible. Sa technique de défense, admettre un peu pour contester l’essentiel. Le choix de cet endroit isolé? « C’est vrai que le lieu peut être stratégique, mais je n’étais pas là pour une agression. »

La peur de sa victime d’être tuée? « Je comprends, mais je ne la regardais pas comme si je voulais la tuer, ce n’était pas mon intention. » Les armes? « J’avais un tournevis pointu à manche amovible, dont je me servais pour une dent cariée, mais pas de couteau de cuisine. »

Ces faits ont déjà été jugés en 2006 à Nanterre (Hauts-de-Seine), Alain Penin a écopé de dix ans de prison. Pourtant, les questions n’ont rien d’anodin : elles servent à voir s’il y a une « méthode Penin ». Car la présidente fait la liste des similitudes entre cette affaire et la mort de Natacha Mougel, en septembre 2010. « Des jeunes femmes qui courent, des armes blanches, des endroits isolés, des étranglements, des menaces de mort, des difficultés sexuelles… » « Pure coïncidence », rétorque Alain Penin, les mains dans le dos camouflant des doigts agités.

« Vous vous réfugiez derrière le mot de pulsion », assène Me Rabier, avocat des parties civiles, qui s’applique à mettre en difficulté Alain Penin, lequel assure n’avoir « rien calculé ». Pas même les mots servis au psychiatre chargé de l’évaluer pour une libération conditionnelle, qu’il décrochera en septembre 2009 : « empathie pour la victime », « regrets », « culpabilité ». Alors qu’un autre expert, un an auparavant, avait noté une absence d’« introspection ». D’où cette autre question, centrale dans ce procès : la récidive d’Alain Penin était-elle détectable? Psychiatres, conseillers pénitentiaires, travailleurs sociaux défilent à la barre pour témoigner de ce qu’ils n’ont pas pu voir. Dans la salle, un homme, Armel Marin, est assis, une photo de sa petite-fille Agnès autour du cou. La collégienne a été victime d’un autre récidiviste en 2011. Il est venu en soutien.


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