mercredi 18 juin 2014

La loi Leonetti au coeur du procès du procès Bonnemaison

Ce médecin est jugé pour l'empoisonnement de sept patients inconscients...
La loi Leonetti trop floue? Le député Jean Leonetti a défendu mardi devant la Cour d'assises, à Pau, la loi sur la fin de vie portant son nom, alors que la défense du docteur Nicolas Bonnemaison, poursuivi pour l'empoisonnement de sept patients, a tenté de mettre en exergue la difficile mise en pratique du texte.

Nicolas Bonnemaison n’est «pas un assassin»

Jean Leonetti a longuement tenté d'expliquer les principes de la loi du 22 avril 2005, peu à l'aise quand on lui a demandé de prendre position sur actes de son «confrère» Nicolas Bonnemaison, disant à un moment qu'il est n'est «pas un assassin», mais indiquant dans la foulée qu'il «avait choisi l'illégalité». Le président Michel le Maître lui a notamment demandé si Nicolas Bonnemaison avait une obligation de consulter d'autres médecins, ce qu'il n'a pas fait, en cas de décision de sédation pour des patients en phase terminale, un acte pouvant entraîner la mort. Le député a dit que le principe de «collégialité» (une obligation en cas d'arrêt d'un traitement, ndlr) n'était pas posé par la loi s'agissant de l'administration d'une substance visant à soulager le patient, même si elle pouvait avoir la mort pour effet secondaire.

«Il a donné la mort à des malades qui ne le demandaient pas»

Il a cependant estimé que Nicolas Bonnemaison, qui assume ses actes depuis le début en les expliquant par sa volonté d'abréger les souffrances de ces malades, avait violé le droit pénal. «Il a donné la mort à des malades qui ne le demandaient pas (...) il a choisi l'illégalité», a-t-il dit. Il a reconnu que face à un patient inconscient on touche à une «limite»
Pour Jean Leonetti, en agissant ainsi, l'urgentiste a pratiqué une médecine qui n'a plus cours, datant d'une époque où les soins palliatifs étaient rares, une médecine «ayant du mal à résister à sa toute puissance» et exercée de manière solitaire. «Aujourd'hui la médecine a changé», a-t-il dit en soulignant aussi l'importance du travail en équipe dans les hôpitaux: «Si on fait ça tout seul, un jour on fait une erreur.» Il a toutefois reconnu que face à un patient inconscient on touchait à une «limite». «On manque d'éléments objectifs pour savoir à quelles doses donner l'antalgique», a-t-il affirmé.
«Je ne me considère pas comme un médecin tout puissant», mais comme un médecin «qui essaie de faire le plus humainement son travail», a répondu Nicolas Bonnemaison, qui comparaît jusqu'au 27 juin.

Soutien de plusieurs confrères

L'urgentiste a reçu le soutien de plusieurs confrères pour qui la réalité quotidienne ne s'accommode pas toujours des préconisations de la loi. «Lorsque les malades sont déjà dans un processus de mort», les médecins se trouvent dans une «zone médicale mal définie, de non droit», a dit le Dr Michel André, ex-anesthésiste et directeur d'hôpital à Bordeaux. Or, la loi Leonetti ne va pas «jusqu'au bout», elle ne concerne que «les patients qui peuvent exprimer leur volonté». Les sept malades traités par Nicolas Bonnemaison étaient dans le coma.

Cette loi «peu de gens la connaissent»

 «La loi Leonetti est une bonne loi dans la mesure où on a du temps», si le patient est conscient et quand les médecins peuvent se concerter, «ce qui n'est pas le cas» dans les unités d'urgence, selon Michel André. Cette loi «peu de gens la connaissent, peu de gens l'appliquent», a-t-il reconnu avant de rappeler qu'il avait été lui-même formé il y a 35 ans à «injecter des cocktails lithiques» comprenant «un sédatif, un antalgique et parfois un curare», substance que Nicolas Bonnemaison a reconnu avoir administré dans un cas.
«Cela se passe encore aujourd'hui», a-t-il dit, avant de rappeler ce que disaient les professeurs de médecine: «Vous avez le devoir de le faire, mais l'interdiction de vous faire prendre!»

http://www.20minutes.fr/societe/1404674-la-loi-leonetti-au-coeur-du-proces-du-proces-bonnemaison

Aucun commentaire: