jeudi 19 juin 2014

Procès Bonnemaison : "On pourrait être très nombreux assis sur le banc

Cinq médecins ont admis jeudi devant la cour d'assises des Pyrénées-Atlantiques à Pau avoir aidé des patients à mourir, allant parfois jusqu'à "l'euthanasie", prenant ainsi la défense de l'urgentiste de Bayonne Nicolas Bonnemaison, poursuivi pour sept empoisonnements. Le docteur Jean-Michel Gouffrand, chirurgien depuis 35 ans à Bayonne dans une clinique privée, a avoué ouvertement avoir provoqué la mort de l'un de ses amis : "Il m 'a demandé : C'est toi qui va me faire la piqûre demain matin ? Le lendemain, je lui ai fait une petite piqûre de morphine, je lui ai pris la main et il a souri. Il est mort avec le sourire", a-t-il raconté. Dans la matinée, Jean Pierre Lacassagne, cardiologue à Biarritz, a aussi déclaré avoir pratiqué cinq "euthanasies", dont trois fois seul, avec de "l'hypnovel et du curare".
Marie-Pierre Kuhn, anesthésiste-réanimateur qui a travaillé avec Nicolas Bonnemaison, a elle aussi raconté comment elle avait administré une piqûre d'hynovel, accélérant la mort d'un patient atteint d'un cancer du poumon. "Il fallait le mettre sous respiration artificielle, il a refusé. Sa femme m'a dit qu'il fallait respecter sa volonté. Il avait trois enfants, il a fallu leur expliquer. J'ai discuté avec mes confrères, avec la famille... Tout ça m'a pris quatre heures durant lesquelles il s'est vu mourir. [...] J'ai mis une seringue d'hypnovel, il est mort dans les bras de sa femme. Vous ne pouvez pas savoir combien je regrette ces quatre heures de perdues", a-t-elle déclaré. Bernard Senet, 65 ans, praticien hospitalier dans le Vaucluse, a avoué avoir aidé aussi des patients à "partir". "On pourrait être très nombreux assis sur le banc à la place de Nicolas Bonnemaion. Il y a deux cas : soit des patients conscients, qui le demandent (...) et vous avez le cas des patients de Bonnemaison qui ont une espérance de vie très courte parce qu'ils ont une pathologie très lourde et qu'on aide à partir", a-t-il dit.
Au total cinq médecins ont ainsi décrit des actes d'accélération de la mort, montrant la ligne ténue entre la sédation, destinée à apaiser la douleur et pouvant avoir comme effet secondaire la mort, autorisée par la loi Leonetti sur la fin de vie, et l'euthanasie, dont le but premier est de donner la mort, et qui est interdite en France. Nicolas Bonnemaison, accusé d'avoir abrégé la vie de sept patients en phase terminale en 2010 et 2011, comparaît jusqu'au 27 juin.

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