Manifestement, sa gestion du patrimoine n’était pas très catholique. À tout le moins, suffisamment intrigante pour que le juge des tutelles saisisse le procureur au regard des agissements constatés.
« De manière habituelle, vous vous serviez sur le compte de votre mère »
Des travaux avaient été entrepris dans la maison maternelle sans en référer au juge (comme il est prévu) et surtout sans justificatifs postérieurs.« Je ne savais pas qu’il fallait procéder ainsi », ose la prévenue qui a la particularité d’être conseillère financière. Le président Troilo lui sonne illico les cloches. « Soit vous êtes particulièrement incompétente, soit il y a un vrai problème. De par votre métier, vous savez comment cela marche. »
Il y a aussi cette ribambelle de chèques émis à partir du chéquier de la maman et qui échouaient sur le compte de la fille. Par exemple, ces 3 500 €. « Je m’occupais de maman depuis cinq ans. J’ai estimé qu’une somme de 700 € par an pour cela, c’était honnête. » Là encore, le président riposte : « Moi, ce qui me semble honnête, c’est de s’occuper de ses parents gratuitement ! »
Et ces autres chèques ? Et ces autres sommes mystérieusement évaporées sans traçabilité ? La fille, aujourd’hui âgée de 49 ans, évoque les travaux sur une chaudière. Elle chiffre le tout autour des 10 000 €. Le hic, c’est que là encore il n’y a aucun justificatif. Normal, elle dit avoir sollicité un ami de la famille. Lequel confirme les travaux mais chiffre le tout, matériel et indemnisation (au noir) à un maximum de 1 000 €. Dix fois moins. Lorsque les gendarmes l’ont entendu, il s’est dit « écœuré » par les pratiques de celle qu’il considérait comme une amie.
« De manière habituelle, vous vous serviez sur le compte de votre mère », résume Alain Troilo. La prévenue évoque encore l’aménagement d’une salle de bains « entre 6 et 8 000 €». Le tribunal demande où sont les justificatifs ? Il n’y en a pas. « Vous croyez que l’on va vous croire sur votre bonne mine ? », secoue toujours un peu plus le président.
« Mais si, j’ai apporté une enveloppe grosse comme ça de factures », conteste la quadragénaire qui gesticule à la barre. Se prend la tête entre les mains. « J’achetais aussi des habits, de la nourriture et une tondeuse à gazon. Je pensais honnêtement… »
« Vous mentez ! »
« Vous mentez ! Il n’y a jamais eu de facture pour les travaux », recadre Marie-Charlotte Fiorio, au ministère public. Me Mireille Thomas, pour le compte de l’Udaf (désigné comme tuteur à la suite de la révélation des faits) s’interroge : « Cette dame est-elle dans le déni ou bien joue-t-elle le déni ? » Pour l’avocate, la prévenue savait pertinemment que tutelle et bénévolat allaient de pair.La procureur reprend la main : « La prévenue prend un air effaré à la barre. J’attendais d’elle une autre attitude… » Pour la représentante du ministère public, il est encore « plus insupportable » de constater que les faits ont été commis par quelqu’un au courant des us et coutume en la matière. Elle constate aussi que dans l’affaire, il n’y a pas que la mère qui est lésée mais aussi les trois autres enfants. De l’ensemble découlent les réquisitions : six mois de prison avec sursis. « Je n’ai pas menti. C’est la greffière qui m’avait dit que j’avais le droit de me rémunérer. J’espère simplement que ma fille fera pareil avec moi… »
Le tribunal a suivi les réquisitions. L’ex-tutrice devra restituer les 21 485 € détournés. « Ça pourra se faire par prélèvements mensuels ? » a simplement demandé la conseillère financière, subite-ment redevenue pragmatique. Il faut dire que le tribunal lui avait fait comprendre que ce type de délit aurait pu lui faire perdre son travail.
http://www.estrepublicain.fr/edition-belfort-hericourt-montbeliard/2015/04/10/la-conseillere-financiere-croque-l-argent-de-sa-mere
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