vendredi 10 avril 2015

La conseillère financière croque l’argent de sa mère

Le pécule de la maman, une habitante d’Échenoz-le-Sec, près de Vesoul, était de 94 000 € en 2008. Moins de quatre ans plus tard, il avait fondu de plus de 21 000 €. Entre-temps, l’une de ses filles, domiciliée à Bart, avait pris les cordons de la bourse. Elle avait été nommée tutrice.
Manifestement, sa gestion du patrimoine n’était pas très catholique. À tout le moins, suffisamment intrigante pour que le juge des tutelles saisisse le procureur au regard des agissements constatés.

« De manière habituelle, vous vous serviez sur le compte de votre mère »

Des travaux avaient été entrepris dans la maison maternelle sans en référer au juge (comme il est prévu) et surtout sans justificatifs postérieurs.
« Je ne savais pas qu’il fallait procéder ainsi », ose la prévenue qui a la particularité d’être conseillère financière. Le président Troilo lui sonne illico les cloches. « Soit vous êtes particulièrement incompétente, soit il y a un vrai problème. De par votre métier, vous savez comment cela marche. »
Il y a aussi cette ribambelle de chèques émis à partir du chéquier de la maman et qui échouaient sur le compte de la fille. Par exemple, ces 3 500 €. « Je m’occupais de maman depuis cinq ans. J’ai estimé qu’une somme de 700 € par an pour cela, c’était honnête. » Là encore, le président riposte : « Moi, ce qui me semble honnête, c’est de s’occuper de ses parents gratuitement ! »
Et ces autres chèques ? Et ces autres sommes mystérieusement évaporées sans traçabilité ? La fille, aujourd’hui âgée de 49 ans, évoque les travaux sur une chaudière. Elle chiffre le tout autour des 10 000 €. Le hic, c’est que là encore il n’y a aucun justificatif. Normal, elle dit avoir sollicité un ami de la famille. Lequel confirme les travaux mais chiffre le tout, matériel et indemnisation (au noir) à un maximum de 1 000 €. Dix fois moins. Lorsque les gendarmes l’ont entendu, il s’est dit « écœuré » par les pratiques de celle qu’il considérait comme une amie.
« De manière habituelle, vous vous serviez sur le compte de votre mère », résume Alain Troilo. La prévenue évoque encore l’aménagement d’une salle de bains « entre 6 et 8 000 €». Le tribunal demande où sont les justificatifs ? Il n’y en a pas. « Vous croyez que l’on va vous croire sur votre bonne mine ? », secoue toujours un peu plus le président.
« Mais si, j’ai apporté une enveloppe grosse comme ça de factures », conteste la quadragénaire qui gesticule à la barre. Se prend la tête entre les mains. « J’achetais aussi des habits, de la nourriture et une tondeuse à gazon. Je pensais honnêtement… »

« Vous mentez ! »

« Vous mentez ! Il n’y a jamais eu de facture pour les travaux », recadre Marie-Charlotte Fiorio, au ministère public. Me Mireille Thomas, pour le compte de l’Udaf (désigné comme tuteur à la suite de la révélation des faits) s’interroge : « Cette dame est-elle dans le déni ou bien joue-t-elle le déni ? » Pour l’avocate, la prévenue savait pertinemment que tutelle et bénévolat allaient de pair.
La procureur reprend la main : « La prévenue prend un air effaré à la barre. J’attendais d’elle une autre attitude… » Pour la représentante du ministère public, il est encore « plus insupportable » de constater que les faits ont été commis par quelqu’un au courant des us et coutume en la matière. Elle constate aussi que dans l’affaire, il n’y a pas que la mère qui est lésée mais aussi les trois autres enfants. De l’ensemble découlent les réquisitions : six mois de prison avec sursis. « Je n’ai pas menti. C’est la greffière qui m’avait dit que j’avais le droit de me rémunérer. J’espère simplement que ma fille fera pareil avec moi… »
Le tribunal a suivi les réquisitions. L’ex-tutrice devra restituer les 21 485 € détournés. « Ça pourra se faire par prélèvements mensuels ? » a simplement demandé la conseillère financière, subite-ment redevenue pragmatique. Il faut dire que le tribunal lui avait fait comprendre que ce type de délit aurait pu lui faire perdre son travail.
http://www.estrepublicain.fr/edition-belfort-hericourt-montbeliard/2015/04/10/la-conseillere-financiere-croque-l-argent-de-sa-mere

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