mercredi 11 mai 2016

Affaire Bettencourt: « Bien sûr que c'étaient des sommes démentes, mais c'était son plaisir »

François Marie Banier, écrivain et photographe de 69 ans, n’est plus le même face à ses juges, depuis l’ouverture de son procès en appel ce lundi. Après 5 semaines de procès initiées à partir de janvier 2015, où ses interventions ont parfois pris des allures de « show », il a été condamné en première instance, le 28 mai 2015 à 3 ans de prison, dont six mois avec sursis, 375.000 euros d’amendes pour abus de faiblesse et de blanchiment de fonds entre septembre 2006 et octobre 2010, au préjudice de Liliane Bettencourt, l’une des premières fortunes de France. Le tribunal correctionnel de Bordeaux avait aussi estimé qu’il devait verser plus 158 millions d’euros au tuteur had hoc de la milliardaire.
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S’il est toujours très à l’aise à la barre, il n’est plus aussi enclin à se raconter et parle avec moins d’emphase. Il dispose d’un appareillage auditif et a demandé à changer de place, lundi, pour se rapprocher des magistrats et mieux entendre les débats. Aux photographes qui l’accueillent dans le hall du palais, il offre un visage crispé qui contraste avec la mine amusée qu’il a souvent affichée en première instance.
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Ce mercredi, il a été interrogé sur ce qui est au centre de l’affaire, c’est-à-dire sa relation avec la milliardaire, par la présidente de la cour, Michèle Esarté. Il rencontre l’héritière de l’Oréal en 1969 mais la côtoie très peu jusqu’en 1987, date à laquelle il réalise son portrait. « Tout de suite quelque chose s’est produit dans la gaieté et la joie. Et très vite, nous sommes allés dans la profondeur, raconte-t-il. Au bout de 2 à 3 ans, elle a décidé de devenir la mécène de mon art. Elle a voulu que je ne m’adonne qu’à ça. »

« Je ne suis pas le réceptacle de ses secrets »

La présidente remarque à travers les nombreux courriers échangés entre le prévenu et la milliardaire qu’elle se confie beaucoup au photographe alors que, lui, ne livre pas de confidences. « Je ne peux pas dire qu’elle se soit confiée à moi. Je ne suis pas le réceptacle de ses secrets. Des tas de zones d’ombre encore secrètes n’appartiennent qu’à elle », se défend François-Marie Banier.
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La présidente, cherchant à comprendre si la victime se trouve dans un état de vulnérabilité au moment des faits, pointe l’âge de la milliardaire, 84 ans en 2006, et son état de santé qui n’est pas très bon : elle souffre de surdité profonde, d’ostéoporose, de troubles de la mémoire et de l’orientation. Le prévenu dépeint lui une femme active, qui marche une heure par jour, reçoit du monde chez elle et assiste à des conseils d’administration de l’Oréal. « C’est une femme qui a cette discipline et qui s’y tient, je ne pense pas que ce soit une illusion de ma part », estime-t-il, reconnaissant qu’elle est plus fatiguée et raccourcit ses rendez-vous à partir de 2009/2010.

« Cette pluie d’or vous ne l’avez jamais refusée ? »

« Je ne sais pas si c’est une dame qui avait conscience du passage du franc à l’euro », s’interroge la présidente. Elle relève que les dons vont en s’accroissant, alors que sa carrière d’artiste est bien entamée. De 1997 à 2001, date limite de la valeur du franc, elle lui verse à travers divers dons 34 millions d’euros puis de 2002 à 2005, 65 millions d’euros et de 2006 à 2009, 106 millions d’euros. « Bien sûr que c’étaient des sommes démentes mais c’était son plaisir. Elle souhaitait que j’ai le même style de vie qu’elle », réagit le prévenu.
« Cette pluie d’or vous ne l’avez jamais refusée, vous n’avez pas pensé à un parapluie ? », s’étonne la présidente. « J’étais très heureux d’avoir cette vie invraisemblable, d’acheter des tableaux, des sculptures etc. Si j’avais vu sa faiblesse une seule seconde, cela aurait été impossible », assure t-il. 
http://www.20minutes.fr/dossier/affaire_bettencourt

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