vendredi 9 septembre 2016

Accident mortel à Charquemont : dix-huit mois de prison avec sursis et annulation du permis pendant dix ans

Même si la chambre de l’instruction de la cour d’appel de Besançon a rejeté l’élément intentionnel, la deuxième victime, blessée dans l’accident, est persuadée que le chauffard voulait la tuer : « Il n’a pas cessé de me regarder. Après, il a dit à son ex-beau-père ‘‘C’est pas la ‘’Dédé’’ [N.D.L.R. : sous-entendu qui est décédée] », souligne, à la barre, la quinquagénaire. Andrée revient de loin. Le 8 mars 2014, elle se promenait tranquillement avec une amie, Murielle, 50 ans, à Charquemont. Au carrefour des rues de l’Est et de l’Église, ces dames ont été fauchées par un habitant de la commune, souffrant - le diagnostic a été posé en 2009 - d’une schizophrénie paranoïde.
Murielle est décédée. Éprouvés, ses parents se tiennent rudes mais tête baissée. Derrière, il y a les enfants, le mari de la victime, tout aussi dévastés. « Je ne comprends pas qu’il ne se souvienne pas d’avoir tué ma mère », intervient le fils. La présidente Audrey Vandendriessche fait l’instruction du dossier, n’écartant pas, et c’est ce qui sera salué par l’une des représentantes des parties civiles, Me Quenot de Belfort, « les zones d’ombre ». « On ne rendra que la vérité judiciaire. Les circonstances restent nébuleuses, » appuie Pierre-Henri Surdey pour les parents de la victime.
Les hésitations du prévenu, sous tutelle depuis 2013, ses volte-face n’éclairent pas les débats. « J’ai percuté une camionnette [N.D.L.R. : dans le virage, il a heurté une camionnette garée sur le trottoir et les deux personnes qui la contournaient]. J’ai entendu un impact. J’ai vaguement vu un bras… », marmonne l’homme, qui a pris la fuite après l’accident. « Monsieur, on voit ou on ne voit pas quelque chose. On ne voit pas vaguement », tranche la présidente.

L’expertise fait foi

Aucun élément factuel n’étaye les convictions des parties civiles. L’expertise en accidentologie révèle que l’accident est dû exclusivement à deux éléments défaillants : des pneus lisses et, surtout, un dysfonctionnement du système de direction assistée (qui aurait obligé le conducteur à donner un violent coup de volant pour se rabattre dans le virage à 90°). « Nous ne bénéficions que d’un témoignage, une dame à sa fenêtre qui a fait deux déclarations contradictoires », rappelle Mireille Thomas, à la défense.
Le vice-procureur Swen Morelle s’en tient aux faits caractérisés (le défaut de maîtrise, le délit de fuite) et à l’expertise en accidentologie : « Il avait conscience que son véhicule n’était plus maîtrisable. Il a senti le choc, vu les corps, son pare-brise étoilé. Il a poursuivi son chemin, est rentré chez lui». Au regard de rapport du psychiatre, qui évoque une altération du discernement (mais le spécialiste n’établit aucun lien direct entre l’accident et la pathologie dont souffre le prévenu), le parquet demande vingt mois de prison avec sursis, l’annulation du permis et l’interdiction de conduire d’un véhicule à moteur pendant dix ans.
« À sa place, on aurait été traumatisé mais le médecin parle d’un affaiblissement des affects. Ce Monsieur met beaucoup plus de temps à ressentir les émotions », plaide Me Thomas.
Le chauffard a été condamné à dix-huit mois de prison avec sursis, à l’annulation du permis pendant dix ans et de conduite d’un véhicule pendant cinq ans. Il a écopé d’une contravention de 500 € et devra payer des dommages et intérêts à la famille meurtrie.
http://www.estrepublicain.fr/edition-haut-doubs/2016/09/08/accident-mortel-a-charquemont-18-mois-de-prison-avec-sursis-et-annulation-du-permis-pendant-10-ans

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