mardi 27 septembre 2016

Procès houleux des salariés d'Air France dans le scandale de la «chemise arrachée

Le procès des quinze salariés d'Air France poursuivis pour violences et dégradations aggravées dans l'affaire dite «des chemises arrachées» lors du comité central d'entreprise du 5 octobre 2015 a repris mardi à Bobigny.
La photo d'un responsable d'Air France, chemise en lambeaux, avait fait le tour du monde, érigée en symbole des tensions sociales en France: un an après, le procès de 15 salariés de la compagnie aérienne s'est ouvert mardi dans une ambiance houleuse.
Applaudissements, protestations, prises de becs entre avocats ont émaillé la première matinée d'audience, devant le tribunal de Bobigny près de Paris, à l'extérieur duquel s'étaient réunis 300 militants syndicaux exigeant la "relaxe" de leurs "camarades".
Les prévenus, dont quatre ont déjà été licenciés par Air France, encourent au maximum trois ans de prison et 45.000 euros d'amendes. Cinq sont jugés pour "violences", dix pour "dégradation".

L'affaire remonte au 5 octobre 2015. Au siège d'Air France, sur le site de l'aéroport Roissy-Charles-de-Gaulle, la direction présente aux représentants du personnel un plan de restructuration qui menace 2.900 emplois. A l'extérieur, plus de 2.000 manifestants sont rassemblés pour protester contre ce projet. Soudain, une centaine parvient à forcer la grille d'accès. Lors d'un mouvement de foule, deux directeurs sont malmenés, ainsi que des vigiles chargés de leur protection. L'un d'eux se retrouve torse nu, forcé d'escalader un grillage pour échapper à la vindicte. L'autre est évacué chemise et costume déchirés entre deux agents de sécurité.

Les deux responsables sortent indemnes de l'épisode mais les images de leur fuite se retrouvent dans les médias du monde entier. Certaines vidéos ont été visionnées lors de l'audience. Sur l'une, on y entend distinctement un salarié menacer le directeur des ressources humaines: "tu as des millions en poche, tu vas payer, tu fais moins le malin maintenant".

La scène met à mal les efforts du gouvernement socialiste pour convaincre les investisseurs étrangers que le climat social s'est apaisé dans un pays habitué aux grèves et manifestations. Les condamnations pleuvent et le Premier ministre Manuel Valls juge que "ces agissements sont l'oeuvre de voyous".

- 'On n'est pas au spectacle' -

Depuis Air France, portée par une conjoncture favorable, est revenue sur son plan de restructuration mais reste secouée par des tensions avec le personnel navigant qui a observé plusieurs jours de grève fin juillet. Le pays s'est aussi embrasé à plusieurs reprises autour d'une réforme du droit de travail jugée trop libérale par ses détracteurs. Plusieurs manifestations ont été émaillées de violences et les images de gaz lacrymogènes dans les rues de la capitale ont, de nouveau, fait les unes de la presse étrangère.
Le syndicat contestataire CGT, à la pointe de l'opposition à la loi sur le travail, est aussi à la tête de la fronde aux abords du tribunal de Bobigny. Plusieurs de ses militants s'y sont retrouvés mardi pour dénoncer une "criminalisation de l'action syndicale", ou une "répression" contre les syndicalistes. "Les libertés syndicales sont fondamentales (...) mais rien ne justifie des violences à l'égard d'innocents", a rétorqué Me Christian Charrière-Bournazel, l'un des avocats d'Air France, en arrivant au palais.

Côté défense, Me Lilia Mhissen, très applaudie par les proches des prévenus venus en nombre les soutenir, aimerait "qu'on ne juge pas les salariés sur des extraits de vidéos qui durent une fraction de seconde mais sur leur action" pendant le déroulé entier de la manifestation. Mais l'ambiance tourne vite au vinaigre. "Baveux", persifle un salarié alors qu'un avocat d'Air France cuisine l'un de ses collègues à la barre. "Pas de manifestations, de protestations, sinon j'évacue la salle: on n'est pas au spectacle, ici!", avertit le président de la chambre.  Les rappels à l'ordre se multiplient, y compris à l'égard des avocats: "vous n'allez pas vous chamailler, vous aussi!", soupire le président. Le jugement sera mis en délibéré.
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